a l'improviste.
Ils venaient d'atteindre une vaste plaine. Le sol, comme en la plupart
des lieux qu'ils avaient deja traverses, etait couvert de seneves
sauvages et de folle avoine; mais neanmoins, la vue s'etendait tres-loin
de toutes parts, excepte du cote gauche, qui etait garni en partie de
broussailles et de sapins. Au milieu de la vallee, murmurait un clair
ruisseau. L'endroit etait donc propice pour y camper pendant la nuit et
pour y faire cuire le souper, leur principal repas. D'ailleurs, comme
ils n'avaient rien rencontre en route, leur inquietude s'etait dissipee
insensiblement, et, a l'exception du Bruxellois, personne ne pensait
plus au danger.
Les havre-sacs furent otes, et, pendant que Jean Creps et le baron
restaient pour veiller sur les provisions et les instruments, les autres
allerent dans le fourre pour chercher le bois necessaire.
Quelques minutes apres, ces derniers etaient de retour. On planta en
terre deux grosses branches fourchues; une branche droite fut placee
horizontalement entre les dents de ces fourches et la voile fut jetee
par-dessus. La tente sous laquelle ils allaient passer la nuit sur la
terre humide etait dressee.
En meme temps, Donat, dont c'etait le tour de faire la cuisine, avait
allume un grand feu et suspendu au-dessus une marmite pleine d'eau
Attachee a une branche de bois, soutenue de la meme maniere que la
toiture rudimentaire de la tente.
Les apprets de ce souper n'etaient pas chose difficile.
Ce que les voyageurs allaient prendre pour renouveler leurs forces etait
la meme nourriture qu'ils mangeaient depuis leur depart de San-Francisco
et qu'ils devaient manger desormais pendant leur trajet et dans les
mines. Le Bruxellois leur avait appris, a cet effet, la maniere de vivre
des chercheurs d'or, et tenait a ce qu'on ne deviat pas de cette regle
etablie par l'experience. Premierement, on fait du cafe: cette boisson
ne manque jamais au repas d'un chercheur d'or. On ecrase grossierement
les grains de cafe entre deux pierres ou d'une autre maniere, puis on
les fait bouillir. Enfin, on jette dans la marmite bouillante un peu
d'eau froide, avec laquelle le marc va au fond. Secondement, on coupe
quelques morceaux de lard sale et on les frit dans la poele.
Troisiemement, on melange un peu de farine de froment avec de l'eau,
et avec la graisse du lard on en fait quelques gateaux. Hors les cas
extraordinaires, la cuisine des chercheurs d'or n'offre pas d'autres
plats.
Pe
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