timent de
compassion: un cri d'anxiete lui echappa et il courut au secours de la
victime. Il avait deja mis la main sur le meurtrier pour le retenir;
mais deux ou trois des assistants le saisirent et le jeterent en arriere
avec tant de violence, qu'il roula jusqu'a l'autre bout de la salle et
tomba sur le dos aux pieds de ses amis.
Les deux Anversois, indignes d'une pareille cruaute, marcherent vers les
joueurs, comme pour leur en demander compte; mais a la vue d'une couple
de revolvers et de trois poignards qui etaient diriges sur eux, ils
s'arreterent stupefaits, et un des etrangers leur dit en bon anglais:
--Restez tranquilles, gentlemen. Respectez la loi de la Californie, la
loi de _non-intervention_. Ce qui se passe ici ne vous regarde pas; ce
sont nos affaires.
L'homme etendu par terre, voyant qu'il devait plier sous la force de son
adversaire, promit de rendre l'or dispute et demanda de pouvoir se
relever. En replacant l'or sur la table, il rugissait horriblement et
ses yeux flamboyaient; il etait visible qu'une ardente soif de vengeance
Brulait dans son coeur. Cependant il souhaita, d'un air sombre, le
bonsoir a ses camarades, passa son poignard dans sa ceinture et se
disposait a quitter la maison, lorsqu'une injure qui lui fut adressee
en guise d'adieu le fit revenir sur ses pas. Il porta a son ennemi un
violent coup de couteau et s'enfuit vers la sortie de la salle. Deux
coups de pistolet retentirent et deux balles trouerent la porte
entr'ouverte. Mais le fuyard avait disparu et ceux qui le poursuivirent
dans la rue revinrent en grommelant.
Les garcons, en entendant les coups de pistolet, etaient entres dans la
salle. On etait occupe a soigner le blesse. Il avait recu un coup de
couteau au travers du bras gauche, et perdait le sang a flots; le
plancher, a ses pieds, etait teint de rouge dans une assez grande
etendue. Cela n'empechait pas l'homme furieux de hurler et de se demener
par desir de vengeance, pendant qu'on pansait son bras; il jurait qu'il
saurait trouver ce soir-la meme le lache assassin et qu'il lui logerait
une balle dans la tete.
A peine son bras fut-il bande, qu'il paya son ecot et sortit de la
maison avec ses compagnons, en rugissant.
Les Flamands ne dirent mot et se regarderent avec stupeur.
Deux garcons apporterent un seau d'eau et laverent les taches de sang du
parquet; l'un d'eux dit en riant aux voyageurs emus:
--Ce n'est rien, gentlemen. Cela vous etonne? Vous n'etes arr
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