s,
dans l'_Eloge de Washington_.]
Dans un autre discours de _rentree_, il maintenait, contrairement au
prejuge regnant, la preeminence du siecle de Louis XIV, et des grands
siecles du gout en general, non-seulement a titre de _gout_, mais aussi
a titre de philosophie:
"Chez les Latins, si vous exceptez Tacite, les auteurs qu'on appelle du
second age, inferieurs pour l'art de la composition, les convenances,
l'harmonie et les graces, ont aussi bien moins de substance et de
vigueur, de vraie philosophie et d'originalite, que Virgile, Horace,
Ciceron et Tite-Live. La France offre les memes resultats. A l'exception
de trois ou quatre grands modernes qui appartiennent encore a demi au
siecle dernier, vous verrez que Racine, Corneille, La Fontaine, Boileau,
Moliere, Pascal, Fenelon, La Bruyere et Bossuet, ont repandu plus
d'idees justes et veritablement profondes que ces ecrivains a qui on a
donne l'orgueilleuse denomination de _penseurs_, comme si on n'avait pas
su penser avant eux avec moins de faste et de recherche."
La theorie litteraire de Fontanes est la; son originalite, comme
critique, consiste, sur cette fin du XVIIIe siecle, a declarer fausse
l'opinion accreditee, "si agreable, disait-il, aux sophistes et aux
rheteurs, par laquelle on voudrait se persuader que les siecles du
gout n'ont pas ete ceux de la philosophie et de la raison." C'etait
proclamer, au nom des Ecoles centrales, precisement le contraire de ce
que Garat venait de precher aux Ecoles normales. Il devancait dans sa
chaire et preparait honorablement la critique litteraire renouvelee, que
le _Genie du Christianisme_ devait bientot illustrer et propager avec
gloire. Ainsi, en parlant un jour des moeurs heroiques de _l'Odyssee_,
il les comparait aux moeurs des patriarches, et rapprochait Eliezer et
Rebecca de Nausicaa. Vite on le denonca la-dessus dans un journal
comme contre-revolutionnaire, et on l'y accusa de recevoir des rois de
_grosses sommes_ pour professer de telles doctrines.
Fontanes ne se renfermait pas, a cette epoque, dans son enseignement;
il prenait par sa plume une part plus active et plus hasardeuse au
mouvement reactionnaire et, selon lui, reparateur, dont M. Fievee, l'un
des acteurs lui-meme, nous a trace recemment le meilleur tableau[117].
Nous le trouvons, avec La Harpe et l'abbe de Vauxcelles, l'un des trois
principaux redacteurs du journal _le Memorial_; et, dans sa mesure
toujours polie, il poussait comme eux au ralliement
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