ue de quelques
jours) a la grande Revolution qu'il representait depuis quarante et
un ans; en ne tombant pas precisement avec elle, il a fait a son tour
l'effet de ceux qui s'obstinent a prolonger ce qui est use et en
arriere. Le public est ingrat; si belle, si soutenue qu'ait ete la
piece donnee a son profit, il ne veut pas que la derniere scene soit
trainante, et que l'acteur principal demeure, en se croyant encore
indispensable, lorsque le gros du drame est fini. Beranger, dans son
role de poete politique, l'a senti a point; il a su se derober pour se
renouveler peut-etre. La Fayette ne l'a pu; son nom, vers la fin, de
plus en plus affiche, tiraille par les partis, a un peu _deteint_, comme
son vieux et noble drapeau. Cela reviendra. Une lecture attentive de ces
Memoires, si on la peut obtenir d'un public passablement indifferent,
est faite pour retablir et rehausser l'idee du personnage historique
dans la grandeur et la continuite de sa ligne principale, avec tous les
accompagnements non moins certains, et beaucoup plus varies qu'on ne
croirait, d'esprit, de jugement ouvert et circonspect, de finesse
serieuse, de bonne grace et de bon gout. Eclairee par ces excellents
Memoires, l'histoire du moins, c'est-a-dire le public definitif, s'en
souviendra.
Aout 1838.
M. DE FONTANES
I
On a remarque dans la suite des familles que souvent le fils, ne
ressemble pas a son pere, mais que le petit-fils rappelle son aieul, le
petit-neveu son grand-oncle, en un mot que la ressemblance parfois saute
une ou deux generations, pour se reproduire (on ne saurait dire comment)
avec une fidelite et une purete singuliere clans un rejeton eloigne.
Il en est de meme, en grand, dans la famille humaine et dans la suite
inepuisable des esprits. Il y a de ces retours a distance, de ces
correspondances imprevues. Un siecle illustre disparait; le glorieux
talent qui le caracterisait le mieux, et dans les nuances les plus
accomplies, meurt, en emportant, ce semble, son secret; ceux qui le
veulent suivre alterent sa trace, les autres la brisent en se jetant de
propos delibere dans des voies toutes differentes: on est en plein dans
un siecle nouveau qui lui-meme decline et va s'achever. Tout d'un coup,
apres ce long espace et cette interruption qui semble definitive, un
talent reparait, en qui sourit une douce et chaste ressemblance avec
l'aieul litteraire. Il ressemble, sans le vouloir, sans y songer, et
par une originalite native: dan
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