s? Quel danger me menace et menace l'Etat? Eh bien, qu'ils
deliberent donc et me laissent dormir en paix!...
--Charles, dit froidement Catherine, ne vous couchez pas. Ou bien, ce
sera peut-etre pour la derniere fois.
Le roi se retourna vivement vers elle. Ses yeux avaient pris cette
expression de terreur, ses joues, cette paleur plombee qu'il avait au
moment de ses crises.
--Que se passe-t-il donc? balbutia Charles IX.
--Il se passe que vous avez heureusement des amis qui veillent sur vous.
Il se passe que, sous quarante-huit heures au plus tard, le Louvre doit
etre envahi, le roi massacre, moi exilee. Il se passe que les vaillants
serviteurs que je viens de vous nommer sont venus m'avertir, et qu'a mon
tour je vous avertis. Maintenant, sire, recouchez-vous, si vous voulez:
je vais prevenir ces amis devoues que leur deliberation est inutile et
que le roi veut dormir en paix...
--Le Louvre envahi! Le roi massacre! repetait Charles en passant ses
mains sur son front jaune. Quelle folie!
Catherine le saisit par un bras qu'elle serra nerveusement.
--Charles, dit-elle d'une voix sombre, vous vous defiez de votre mere,
de votre frere, de ceux qui vous aiment et dont l'interet meme, a defaut
de leur affection, vous garantit le devouement. Ce qui est de la folie,
c'est de vous livrer pieds et poings lies a ces maudits heretiques, qui
ont horreur de notre religion, et qui, pour en arriver a leurs fins,
sont obliges de commencer par tuer le fils aine de l'Eglise...
Qu'avez-vous fait, Charles? Vous avez comble ces gens-la des marques de
votre affection, au point que la chretiente catholique du royaume est
reduite au desespoir, au point que trois mille seigneurs catholiques.
Guise en tete, ont pris la resolution de sauver la France et l'Eglise
malgre vous!... Vous voila donc pris entre ces deux forces egalement
redoutables: les huguenots, remplis d'orgueil et resolus a nous imposer
la reforme; les catholiques, desesperes, furieux, accules a la revolte
supreme. L'instant est grave, sire! Si grave que je me demande si, sur
le point de tout perdre, honneur et couronne, nous ne ferions pas bien
de sauver tout au moins notre vie en prenant la fuite! Votre attitude
d'aujourd'hui a mis le feu aux poudres. En jurant publiquement, en
pleine rue, de venger un malheureux coup d'arquebuse qui a effleure le
cher amiral, vous avez souleve le peuple entier. En faisant crier l'edit
qui desarme les bourgeois, vous avez accredite le br
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