alors, pardonnez-vous vous-meme, et n'en parlons plus.
--Parlons-en au contraire, et je vous demande en grace de m'ecouter;
soyez convaincue que vous n'entendrez pas un mot qui ne soit
l'expression du respect le plus pur.
Arrives au bout du jardin, nous allions revenir sur nos pas et deja elle
s'etait retournee, je me placai devant elle, et, de la main, du regard,
je la priai de s'arreter.
--Hier, je vous ai dit, mademoiselle, que je venais a Cassis pour y
remplir une mission dont on m'avait charge, et sur cette parole vous
avez bien voulu m'ouvrir votre maison et me mettre en relation avec
monsieur votre pere; eh bien, cette parole etait fausse.
Elle recula de deux pas, et me regardant d'une facon etrange ou il y
avait plus de curiosite que de colere:
--Fausse? dit-elle.
--Voici la verite. Apres avoir danse avec vous sans vous connaitre,
attire seulement pres de vous par une profonde sympathie et par une
vive admiration,--pardonnez-moi le mot, il est sincere,--j'ai demande a
Marius Bedarrides qui vous etiez. Alors il m'a parle de vous, du general
et de ce _saule_,--temoignage d'une pieuse reconnaissance. J'ai voulu
vous revoir, et en vous retrouvant dans le coupe de cette diligence, au
lieu de me taire ou de vous dire la verite, j'ai invente cette fable
ridicule d'une mission a Cassis.
--Sinon ridicule, au moins etrange dans l'intention qui l'a inspiree.
--Oh! l'intention, je la defendrai, car je vous fais le serment qu'elle
n'etait pas coupable. J'ai voulu vous revoir, voila tout. Et en me
retrouvant avec vous, j'ai ete amene, je ne sais trop comment, peut-etre
par crainte de paraitre avoir cherche et prepare cette rencontre, j'ai
ete entraine dans cette histoire qui s'est faite en sortant de mes
levres et qui depuis s'est compliquee d'incidents auxquels le hasard a
eu plus de part que moi. Mais en me voyant accueilli comme je l'ai ete
par vous et par monsieur votre pere, je ne peux pas persister plus
longtemps dans ce mensonge dont j'ai honte.
Il y eut un moment de silence entre nous qui me parut mortel, car ce
qu'elle allait repondre deciderait de ma vie et l'angoisse m'etreignait
le coeur. Je ne regrettais pas d'avoir parle, mais j'avais peur d'avoir
mal parle, et ce que j'avais dit n'etait pas tout ce que j'aurais voulu
dire.
--Et que voulez-vous que je reponde a cette confidence extraordinaire?
dit-elle enfin sans lever les yeux sur moi.
--Rien qu'un mot, qui est que, sachant la verite, vo
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