se faire
le quart de ce que nous avons vu.
-- Quoi donc?
-- Se cacher pour danser, feindre une indisposition pour diner
tete a tete.
-- Oh! monseigneur, non! non!
-- Si! si! cria le prince en s'excitant lui-meme comme les enfants
volontaires; mais je n'endurerai pas cela plus longtemps, il faut
qu'on sache ce qui se passe.
-- Monseigneur, un eclat...
-- Pardieu! dois-je me gener quand on se gene si peu avec moi?
Attends moi ici, chevalier, attends-moi!
Le prince disparut dans la chambre voisine, et s'informa de
l'huissier si la reine mere etait revenue de la chapelle.
Anne d'Autriche etait heureuse: la paix revenue au foyer de sa
famille, tout un peuple charme par la presence d'un souverain
jeune et bien dispose pour les grandes choses, les revenus de
l'Etat agrandis, la paix exterieure assuree, tout lui presageait
un avenir tranquille.
Elle se reprenait parfois au souvenir de ce pauvre jeune homme
qu'elle avait recu en mere et chasse en maratre.
Un soupir achevait sa pensee. Tout a coup le duc d'Orleans entra
chez elle.
-- Ma mere, s'ecria-t-il en fermant vivement les portieres, les
choses ne peuvent subsister ainsi.
Anne d'Autriche leva sur lui ses beaux yeux, et, avec une
inalterable douceur:
-- De quelle chose voulez-vous parler? dit-elle.
-- Je veux parler de Madame.
-- Votre femme?
-- Oui, ma mere.
-- Je gage que ce fou de Buckingham lui aura ecrit quelque lettre
d'adieu.
-- Ah bien! oui, ma mere, est-ce qu'il s'agit de Buckingham!
-- Et de qui donc alors? Car ce pauvre garcon etait bien a tort le
point de mire de votre jalousie, et je croyais...
-- Ma mere, Madame a deja remplace M. de Buckingham.
-- Philippe, que dites-vous? Vous prononcez la des paroles
legeres.
-- Non pas, non pas. Madame a si bien fait que je suis encore
jaloux.
-- Et de qui, bon Dieu?
-- Quoi! vous n'avez pas remarque?
-- Non.
-- Vous n'avez pas vu que M. de Guiche est toujours chez elle,
toujours avec elle?
La reine frappa ses deux mains l'une contre l'autre et se mit a
rire.
-- Philippe, dit-elle, ce n'est pas un defaut que vous avez la;
c'est une maladie.
-- Defaut ou maladie, madame, j'en souffre.
-- Et vous pretendez qu'on guerisse un mal qui existe seulement
dans votre imagination? Vous voulez qu'on vous approuve, jaloux,
quand il n'y a aucun fondement a votre jalousie?
-- Allons, voila que vous allez recommencer pour celui-ci ce que
vous disiez pour celui-
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