hainement de ces nouveaux jacobins. Sieyes surtout
avait une grande habitude de les craindre, et il se prononcait contre
eux avec toute la vivacite de son humeur. Au reste, ils pouvaient
paraitre redoutables, car, independamment des criards et des brouillons
qui etalaient leur energie dans les clubs ou dans les journaux, ils
comptaient des partisans plus braves, plus puissans, et par consequent
dangereux, dans le gouvernement lui-meme. Il y avait dans les conseils
tous les patriotes repousses une premiere fois par les scissions, et
entres de force aux elections de cette annee, qui, en langage plus
modere, repetaient a peu pres ce qui se disait dans la societe du
Manege. C'etaient des hommes qui ne voulaient pas courir la chance d'une
nouvelle constitution, qui se defiaient d'ailleurs de ceux qui voulaient
la faire, et qui craignaient qu'on ne cherchat dans les generaux un
appui redoutable. Ils voulaient de plus, pour tirer la France de ses
perils, des mesures semblables a celles qu'avait employees le comite
de salut public. Les anciens, plus mesures et plus sages, par leur
position, partageaient peu cet avis, mais plus de deux cents membres le
soutenaient chaudement dans les cinq-cents. Il n'y avait pas seulement
dans le nombre des tetes chaudes comme Augereau, mais des hommes sages
et eclaires comme Jourdan. Ces deux generaux donnaient au parti patriote
un grand ascendant sur les cinq-cents. Au directoire, ce parti avait
deux voix: Gohier et Moulins. Barras restait indecis; d'une part, il se
defiait de Sieyes, qui lui temoignait peu d'estime et le regardait comme
pourri; d'autre part, il craignait les patriotes et leurs extravagances.
Il hesitait ainsi a se prononcer. Dans le ministere, les patriotes
venaient de trouver un appui dans Bernadotte. Ce general etait beaucoup
moins prononce que la plupart des generaux de l'armee d'Italie, et on
doit se souvenir que sa division, en arrivant sur le Tagliamento, fut en
querelle avec la division Augereau au sujet du mot _monsieur_, qu'elle
substituait deja a celui de _citoyen_. Mais Bernadotte avait une
ambition inquiete; il avait vu avec humeur la confiance accordee a
Joubert par le parti reorganisateur; il croyait qu'on songeait a Moreau
depuis la mort de Joubert, et cette circonstance l'indisposant contre
les projets de reorganisation, le rattachait entierement aux patriotes.
Le general Marbot, commandant de la place de Paris, republicain violent,
etait dans le memes dispositi
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