Il ne restait a combattre
que l'armee turque, privee de cavalerie, mais campee derriere des
retranchemens, et disposee a y resister avec son opiniatrete accoutumee.
Bonaparte, apres avoir jete un coup d'oeil sur Alexandrie, et sur les
beaux travaux executes par le colonel Cretin, apres avoir reprimande son
lieutenant Marmont, qui n'avait pas ose attaquer les Turcs au moment du
debarquement, quitta Alexandrie le 6 thermidor (24 juillet). Il etait
le lendemain 7 a l'entree de la presqu'ile. Son projet etait d'abord
d'enfermer l'armee turque par des retranchemens, et d'attendre, pour
attaquer, l'arrivee de toutes ses divisions; car il n'avait sous la main
que les divisions Lannes, Bon, Murat, environ six mille hommes. Mais
a la vue des dispositions faites par les Turcs, il changea d'avis, et
resolut de les attaquer sur-le-champ, esperant les renfermer dans le
village d'Aboukir, et les accabler d'obus et de bombes.
Les Turcs occupaient le fond de la presqu'ile, qui est fort etroite. Ils
etaient couverts par deux lignes de retranchemens. A une demi-lieue en
avant du village d'Aboukir, ou etait leur camp, ils avaient occupe deux
mamelons de sables, appuyant l'un a la mer, l'autre au lac de Madieh, et
formant ainsi leur droite et leur gauche. Au centre de ces deux mamelons
etait un village, qu'ils gardaient aussi. Ils avaient mille hommes au
mamelon de droite, deux mille a celui de gauche, et trois a quatre mille
hommes dans le village. Telle etait leur premiere ligne. La seconde
etait au village meme d'Aboukir. Elle se composait de la redoute
construite par les Francais, et se joignait a la mer par deux boyaux.
Ils avaient place la leur camp principal et le gros de leurs forces.
Bonaparte fit ses dispositions avec sa promptitude et sa precision
accoutumees. Il ordonna au general Destaing de marcher avec quelques
bataillons sur le mamelon de gauche, ou etaient les mille Turcs; a
Lannes, de marcher sur le mamelon de droite, ou etaient les deux mille
autres, et a Murat, qui etait au centre, de faire filer la cavalerie sur
les derrieres des deux mamelons. Ces dispositions sont executees avec
une grande precision: Destaing marche sur le mamelon de gauche, et le
gravit hardiment; Murat le fait tourner par un escadron. Les Turcs, a
cette vue, abandonnent leur poste, rencontrent la cavalerie qui les
sabre et les pousse dans la mer, ou ils aiment mieux se jeter que de se
rendre. Vers la droite, la meme operation s'execute. Lannes a
|