'en voulaient plus depuis sa conduite envers la
societe du Manege; les republicains, attaches a la constitution de
l'an III, n'avaient que du mepris et de la defiance pour lui. Les
reformateurs, les politiques, n'y voyaient qu'un homme deconsidere, et
lui appliquaient le mot de _pourri_, imagine par Bonaparte. Il ne lui
restait que quelques intrigues avec les royalistes, au moyen de certains
emigres caches dans sa cour. Ces intrigues etaient fort anciennes:
elles avaient commence des le 18 fructidor. Il en avait fait part au
directoire, et s'etait fait autoriser a les poursuivre, pour avoir dans
les mains les fils de la contre-revolution. Il s'etait ainsi menage
le moyen de trahir a volonte la republique ou le pretendant. Il etait
question dans ce moment, avec ce dernier, d'une somme de quelques
millions, pour seconder son retour. Il est possible, du reste, que
Barras ne fut pas sincere avec le pretendant, car tous ses gouts
devaient etre pour la republique. Mais savoir au juste les preferences
de ce vieux corrompu, serait difficile. Peut-etre les ignorait-il
lui-meme. D'ailleurs, a ce point de corruption, un peu d'argent doit
malheureusement prevaloir sur toutes les preferences de gout ou
d'opinion.
Fouche, desespere de voir son patron perdu, desespere surtout de se voir
compromis dans sa disgrace, redoubla d'assiduites aupres de Bonaparte.
Celui-ci, se defiant d'un pareil homme, lui cacha tous ses secrets; mais
Fouche ne se rebutant pas, parce qu'il voyait la victoire de Bonaparte
assuree, resolut de vaincre ses rigueurs a force de services. Il avait
la police, il la faisait habilement, et il savait que l'on conspirait
partout. Il se garda d'en avertir le directoire, dont la majorite,
composee de Moulins, Gohier et Barras, aurait pu tirer de ses
revelations un parti funeste aux conjures.
Il y avait une quinzaine de jours que Bonaparte etait a Paris, et
presque tout etait deja prepare. Berthier, Lannes, Murat, gagnaient
chaque jour les officiers et les generaux. Parmi eux, Bernadotte
par jalousie, Jourdan par attachement a la republique, Augereau par
jacobinisme, s'etaient rejetes en arriere, et avaient communique
leurs craintes a tous les patriotes des cinq-cents; mais la masse des
militaires etait gagnee. Moreau, republicain sincere, mais suspect aux
patriotes qui dominaient, mecontent du directoire qui avait si mal
recompense ses talens, n'avait de recours qu'en Bonaparte. Caresse,
gagne par lui, et supportant t
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