tait chaud patriote; il eut avis du projet, courut le denoncer a Gohier
et a Moulins, mais n'en fut pas cru. Ils croyaient bien a une grande
ambition, mais non encore a une conjuration prete a eclater. Barras
voyait bien un grand mouvement; mais il se sentait perdu de toute facon,
et il se laissait lachement aller aux evenemens.
La commission des anciens, que presidait le depute Cornet, eut la
mission de tout preparer dans la nuit du 17 au 18, pour faire rendre le
decret de translation. On ferma les volets et les rideaux des fenetres,
pour que le public ne fut pas averti par les lumieres du travail de
nuit qui se faisait dans les bureaux de la commission. On eut soin
de convoquer le conseil des anciens pour sept heures, et celui des
cinq-cents pour onze. De cette maniere, le decret de translation devait
etre rendu avant que les cinq-cents fussent en seance; et, comme toute
deliberation etait interdite par la constitution a l'instant ou le
decret de translation etait promulgue, on fermait par cette promulgation
la tribune des cinq-cents, et on s'epargnait toute discussion
embarrassante. On eut un autre soin, ce fut de differer pour certains
deputes l'envoi des lettres de convocation. On fut certain par la que
ceux dont on se defiait n'arriveraient qu'apres la decision rendue.
De son cote, Bonaparte avait pris toutes les precautions necessaires. Il
avait mande le colonel Sebastiani, qui commandait le 9e de dragons, pour
s'assurer des dispositions du regiment. Ce regiment se composait
de quatre cents hommes a pied et de six cents hommes a cheval. Il
renfermait beaucoup de jeunes soldats; mais les vieux soldats d'Arcole
et de Rivoli y donnaient le ton. Le colonel repondit du regiment a
Bonaparte. Il fut convenu que le colonel, sous pretexte de passer une
revue, sortirait a cinq heures de ses casernes, distribuerait son
monde, partie sur la place de la Revolution, partie dans le jardin des
Tuileries, et qu'il viendrait lui-meme, avec deux cents hommes a cheval,
occuper les rues du Mont-Blanc et Chantereine. Bonaparte fit ensuite
dire aux colonels des autres regimens de cavalerie, qu'il les passerait
en revue le 18. Il fit dire aussi a tous les officiers qui demandaient
a lui etre presentes, qu'il les recevrait le matin du meme jour. Pour
excuser le choix de l'heure, il pretexta un voyage. Il avertit Moreau et
tous les generaux de vouloir bien se trouver rue Chantereine a la meme
heure. A minuit, il envoya un aide-de-camp a
|