vrai parti, au parti reformateur, et s'unir a Sieyes, qui avait une
constitution toute faite, et la majorite dans le conseil des anciens.
Bonaparte etait bien de leur avis, et sentait qu'il n'avait pas de choix
a faire; mais il fallait qu'on le rapprochat de Sieyes, et c'etait
difficile. Cependant les interets etaient si grands, et il y avait
entre son orgueil et celui de Sieyes des entremetteurs si delicats,
si adroits, que l'alliance ne pouvait pas tarder a se faire. M. de
Talleyrand eut concilie des orgueils encore plus sauvages que celui de
ces deux hommes. Bientot la negociation fut entamee et achevee. Il fut
convenu qu'une constitution plus forte serait donnee a la France, sous
les auspices de Sieyes et de Bonaparte. Sans qu'on se fut explique sur
la forme et l'espece de cette constitution, il fut sous-entendu qu'elle
serait republicaine, mais qu'elle delivrerait la France de ce que
l'un et l'autre appelaient les bavards, et donnerait aux deux esprits
puissans qui s'alliaient la plus grande part d'influence.
Un systematique revant l'accomplissement trop differe de ses
conceptions, un ambitieux voulant regir le monde, etaient, au milieu
de ce neant de tous les systemes et de toutes les forces, eminemment
propres a se coaliser. Peu importait l'incompatibilite de leur humeur.
L'adresse des intermediaires et la gravite des interets suffisaient pour
pallier cet inconvenient, du moins pour un moment: et c'etait assez d'un
moment pour faire une revolution.
Bonaparte etait donc decide a agir avec Sieyes et Roger-Ducos. Il
montrait toujours le meme eloignement pour Barras, les memes egards pour
Gohier et Moulins, et gardait une egale reserve avec les trois. Mais
Fouche, habile a deviner la fortune naissante, voyait avec le plus grand
regret l'eloignement de Bonaparte pour son patron Barras, et etait
desole de voir que Barras ne fit rien pour vaincre cet eloignement. Il
etait tout a fait decide a passer dans le camp du nouveau Cesar; mais
hesitant, par un reste de pudeur, a abandonner son protecteur, il aurait
voulu l'y entrainer a sa suite. Assidu aupres de Bonaparte, et assez
bien accueilli, parce qu'il avait le portefeuille de la police, il
tachait de vaincre sa repugnance pour Barras. Il etait seconde par Real,
Bruix, et les autres conseillers du general. Croyant avoir reussi, il
engagea Barras a inviter Bonaparte a diner. Barras l'invita pour le
8 brumaire (30 octobre). Bonaparte s'y rendit. Apres le diner,
ils comm
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