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an VII (7 octobre 1798), une bataille acharnee contre les restes
desesperes de Mourad-Bey. Aucun des combats des Francais en Egypte ne
fut aussi sanglant. Deux mille Francais eurent a lutter contre quatre
mille Mameluks et huit mille fellahs, retranches dans le village de
Sediman. La bataille se passa comme celle des Pyramides, et comme toutes
celles qui furent livrees en Egypte. Les fellahs etaient derriere les
murs du village, et les cavaliers dans la plaine. Desaix s'etait forme
en deux carres, et avait place sur ses ailes deux autres petits carres,
pour amortir le choc de la cavalerie ennemie. Pour la premiere fois,
notre infanterie fut rompue, et l'un des petits carres enfonce. Mais,
par un instinct subit et admirable, nos braves soldats se coucherent
aussitot par terre, afin que les grands carres pussent faire feu sans
les atteindre. Les Mameluks, passant sur leurs corps, chargerent les
grands carres avec furie pendant plusieurs heures de suite, et vinrent
expirer en desesperes sur les baionnettes. Suivant l'usage, les
carres s'ebranlerent ensuite, pour attaquer les retranchemens, et les
emporterent. Pendant ce mouvement, les Mameluks, decrivant un arc de
cercle, vinrent egorger les blesses sur les derrieres, mais on les
chassa bientot de ce champ de carnage, et les soldats furieux en
massacrerent un nombre considerable. Jamais plus de morts n'avaient
jonche le champ de bataille. Les Francais avaient perdu trois cents
hommes. Desaix continua sa marche pendant tout l'hiver, et apres une
suite de combats, devenu maitre de la Haute-Egypte jusqu'aux cataractes,
il fit autant redouter sa bravoure que cherir sa clemence. Au Caire,
on avait appele Bonaparte le sultan Kebir, _sultan de feu_; dans la
Haute-Egypte, Desaix fut nomme _sultan le juste_.
Bonaparte, pendant ce temps, avait fait une marche jusqu'a Belbeys, pour
rejeter Ibrahim-Bey en Syrie, et il avait recueilli en route les debris
de la caravane de la Mecque, pillee par les Arabes. Revenu au Caire, il
continua a y etablir une administration toute francaise. Une revolte,
excitee au Caire par les agens secrets de Mourad-Bey, fut durement
reprimee, et decouragea tout a fait les ennemis des Francais[8]. L'hiver
de 1798 a 1799 s'ecoula ainsi dans l'attente des evenemens. Bonaparte
apprit dans cet intervalle la declaration de guerre de la Porte, et les
preparatifs qu'elle faisait contre lui, avec l'aide des Anglais. Elle
formait deux armees, l'une a Rho
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