s des deux conseils. Elles ne pouvaient etre plus
mauvaises. L'opposition constitutionnelle s'etait reunie a l'opposition
patriote. L'une composee d'ambitieux qui voulaient un gouvernement
nouveau, et d'importans qui se plaignaient que leurs avis et leurs
recommandations n'eussent pas ete assez bien accueillis; l'autre formee
de patriotes exclus par les scissions du corps legislatif, ou reduits au
silence par la loi du 19 fructidor; elles voulaient egalement la ruine
du gouvernement existant. Ils disaient que le directoire avait a la fois
mal administre et mal defendu la France; qu'il avait viole la liberte
des opinions, opprime la liberte de la presse et des societes
populaires. Ils le declaraient a la fois faible et violent; ils allaient
meme jusqu'a revenir sur le 18 fructidor, et a dire que, n'ayant pas
respecte les lois dans cette journee, il ne pouvait plus les invoquer en
sa faveur.
La nomination de Sieyes au directoire avait ete l'un des premiers motifs
de ces dispositions. Appeler au directoire un homme qui n'avait cesse
de regarder comme mauvaise la constitution directoriale, qui deja, par
cette raison, avait refuse d'etre directeur, c'etait annoncer en quelque
sorte qu'on voulait une revolution. L'acceptation de Sieyes, dont on
doutait a cause de ses refus anterieurs, ne fit que confirmer ces
conjectures.
Les mecontens de toute espece, qui voulaient un changement, se
grouperent autour de Sieyes. Sieyes n'etait point un chef de parti
habile; il n'en avait ni le caractere a la fois souple et audacieux, ni
meme l'ambition; mais il ralliait beaucoup de monde par sa renommee.
On savait qu'il trouvait tout mauvais dans la constitution et le
gouvernement, et on se pressait autour de lui, comme pour l'inviter
a tout changer. Barras, qui avait su se faire pardonner son ancienne
presence au directoire par ses liaisons et ses intrigues avec tous les
partis, s'etait rapproche de Sieyes, et etait parvenu a se rattacher
a lui, en livrant lachement ses collegues. C'est autour de ces deux
directeurs que se ralliaient tous les ennemis du directoire. Ce parti
avait songe a se donner l'appui d'un jeune general qui eut de la
reputation, et qui passat, comme beaucoup d'autres, pour une victime du
gouvernement. La position de Joubert, sur lequel on fondait de grandes
esperances, et qui etait sans emploi depuis sa demission, avait fixe le
choix sur lui. Il allait s'allier a M. de Semonville, en epousant une
demoiselle de Monthe
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