dames? En voici
une qui vous compromet devant tout le monde, et vous pouvez en etre
fier; vous etes le premier pour qui Mlle Zemire ait jamais montre une si
grande passion.
--Elle et moi, reprit Martin, nous avons dejeune un jour au quai
d'Orsay, a la meme table, et je suis bien content qu'elle ait daigne
s'en souvenir.
--Apres la recommandation de ma fille, reprit le general, je n'en sais
pas de plus puissante que l'amitie de ma petite Zemire. Elle est la joie
de la maison.
Le colonel fut reconduit chez lui par tous les officiers, mais les vrais
saluts et les felicitations de ces braves gens s'adresserent surtout a
leur exemple, a leur ami le commandant Martin. Cette fois donc justice
etait rendue, et pas un ne s'etonna lorsqu'aux premiers jours de juillet
un officier d'ordonnance apporta sous un pli cachete aux armes du
general l'invitation que voici:
"Mlle Louise et Zemire de Beaulieu et M. le general de Beaulieu prient
M. le _colonel_ Martin de leur faire l'honneur de diner, demain mardi, a
l'hotel du general."
Le lecteur a devine que dans l'intervalle une grande amitie s'etait
etablie entre le colonel Martin et le general de Beaulieu. Le colonel
etait recu comme un ami de tous les jours, et c'etait dans ce logis bien
tenu a qui s'empresserait de lui faire oublier son isolement. Quant
a s'inquieter des sentiments qu'il pouvait inspirer a Mlle Louise de
Beaulieu, il ne s'en inquietait pas le moins du monde. Il entourait la
jeune fille de ses meilleures deferences et de tous ses respects. Pensez
donc s'il fut etonne lorsque Mlle Mariette, l'interrogeant a la facon du
juge d'instruction:
--Nous voudrions savoir, Monsieur le colonel, dans quelles intentions
vous venez si souvent dans notre maison. Il serait temps de le dire,
surtout si c'est notre jeune demoiselle qui vous attire. A vous parler
franchement, il ne depend que de vous d'obtenir la main de Mlle de
Beaulieu. Il nous a semble que vous n'etiez pas mal vu de Mlle Louise,
et que votre mariage serait facile avec elle, n'etait le chagrin que son
pere en ressentirait.
A cette declaration inattendue, qui fut bien etonne? Le bon Martin. Il
resta quelque temps confondu et penetre du bonheur qui l'epouvantait.
Mais enfin, d'une voix tres emue il repondit:
--Pensez-vous donc, Mademoiselle Mariette, que je pourrais oublier
la dette que j'ai contractee envers le general de Beaulieu, mon
bienfaiteur, en lui derobant le coeur de sa fille? Je serais son p
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