ace a celle qu'il visitait d'ordinaire, introduisit la clef dans la
serrure.
Moins avance que son geolier, Serge Ladko n'avait meme pas le choix
entre plusieurs explications de son aventure. Le mystere lui en
paraissait toujours aussi impenetrable, et il avait renonce a imaginer
des conjectures sur les motifs que l'on pouvait avoir de le sequestrer.
Quand, apres un fievreux sommeil, il s'etait reveille au fond de son
cachot, la premiere sensation qu'il eprouva fut celle de la faim. Plus
de vingt-quatre heures s'etaient alors ecoulees depuis son dernier
repas, et la nature ne perd jamais ses droits, quelle que soit la
violence de nos emotions.
Il patienta d'abord, puis, la sensation devenant de plus en plus
imperieuse, il perdit le beau calme qui l'avait soutenu jusque-la.
Allait-on le laisser mourir d'inanition? Il appela. Personne ne
repondit. Il appela plus fort. Meme resultat. Il s'egosilla enfin en
hurlements furieux, sans obtenir plus de succes.
Exaspere, il s'efforca de briser ses liens. Mais ceux-ci etaient solides
et c'est en vain qu'il se roula sur le parquet en tendant ses muscles a
les rompre.
Dans un de ces mouvements convulsifs, son visage heurta un objet
depose pres de lui. Le besoin affine les sens. Serge Ladko reconnut
immediatement du pain et un morceau de lard qu'on avait sans doute mis
la pendant son sommeil. Profiter de cette attention de ses geoliers
n'etait pas des plus faciles, dans la situation ou il se trouvait. Mais
la necessite rend industrieux, et, apres plusieurs essais infructueux,
il reussit a se passer du secours de ses mains.
Sa faim satisfaite, les heures coulerent lentes et monotones. Dans le
silence, un murmure, un frissonnement, semblable a celui des feuilles
agitees par une brise legere, venait frapper son oreille. Le bateau qui
le portait etait evidemment en marche et fendait, comme un coin, l'eau
du fleuve.
Combien d'heures s'etaient-elles succede, quand une trappe fut soulevee
au-dessus de lui? Suspendue au bout d'une ficelle, une ration semblable
a celle qu'il avait decouverte a son premier reveil, oscilla dans
l'ouverture qu'eclairait une lumiere incertaine et vint se poser a sa
portee.
Des heures coulerent encore, puis la trappe s'ouvrit de nouveau. Un
homme descendit, s'approcha du corps inerte, et Serge Ladko, pour la
seconde fois, sentit qu'on lui recouvrait la bouche d'un large baillon.
C'est donc qu'on avait peur de ses cris et qu'il passait a proximite
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