dacieux, assez subtil, pour
mener a bien une telle entreprise?
D'un commun accord, comme s'ils se fussent donne le mot, Rosny, Sancy,
du Bartas, d'Aubigne, se tournerent vers Pardaillan. Et cet hommage muet
fut si spontane, si sincere que le chevalier se sentit doucement emu.
--Je serai donc celui-la, dit-il avec simplicite.
--Vous consentez donc? Ah! chevalier, s'ecria le Bearnais, si jamais je
suis roi... roi de France... je vous devrai ma couronne!
--Eh! sire, vous ne me devrez rien...
Le roi reflechit un instant, et:
--Pour faciliter autant que possible l'execution de cette mission
forcement occulte, mais qui doit aboutir coute que coute, il est
necessaire que vous soyez couvert par une autre mission, officielle,
celle-la. En consequence, vous irez trouver le roi Philippe d'Espagne,
et vous le mettrez en demeure de retirer les troupes qu'il entretient
dans Paris.
Et, se tournant vers son secretaire:
--Ruse, preparez des lettres accreditant M. le chevalier de Pardaillan
comme notre ambassadeur extraordinaire aupres de S. M. Philippe
d'Espagne. Preparez, en outre, des pleins pouvoirs pour M.
l'ambassadeur. Combien d'hommes desirez-vous que je mette a votre
disposition? demanda-t-il alors a Pardaillan.
--Des hommes?... Pour quoi faire, sire?... fit Pardaillan, avec son air
naivement etonne.
--Comment, pour quoi faire?... s'ecria le roi stupefait. Vous ne
pretendez pourtant pas entreprendre cette affaire-la seul?
--Ma foi, sire, repondit le chevalier avec un flegme
imperturbable, je ne pretends rien!... Mais il est de fait que, si je
dois reussir dans cette affaire, c'est seul que je reussirai... C'est
donc seul que je l'entreprendrai, ajouta-t-il froidement, en fixant sur
le roi un oeil etincelant.
--Ventre-saint-gris! s'ecria le roi suffoque. Puis, considerant
Pardaillan un moment avec une admiration qu'il ne chercha pas a cacher,
il lui demanda, tres calme:
--Quand comptez-vous partir?
--A l'instant, sire.
--Ouf!... Voila un homme, au moins!... Touchez la, monsieur.
Pardaillan serra la main du roi et sortit aussitot, suivi de pres par
Sancy. Au moment ou le chevalier se disposait a monter a cheval, Sancy
lui remit ses lettres de creance et son pouvoir, et:
--Monsieur de Pardaillan, dit-il. Sa Majeste m'a charge de vous remettre
ces mille pistoles pour vos frais de route.
Pardaillan prit le sac rebondi avec une satisfaction visible, et,
toujours gouailleur:
--Vous avez bien
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