lace a mon
balcon. Venez, madame, vous verrez un spectacle interessant... Tel que
vous n'avez jamais rien vu de semblable, insista-t-il avec la meme
intonation qui avait deja frappe Fausta.
Et ses paroles etaient accompagnees d'un geste de conge, aussi gracieux
qu'il pouvait l'etre chez un tel personnage.
--J'accepte avec joie, sire, dit Fausta, se levant.
Au meme instant la porte s'ouvrit et un huissier annonca:
--M. le chevalier de Pardaillan, ambassadeur de S. M. le roi Henri de
Navarre.
Et, tandis que Fausta, malgre elle, restait clouee sur place, tandis
que le roi la fixait avec cette insistance qui decontenancait les plus
intrepides et les plus grands de son royaume, le chevalier s'avancait
d'un pas assure, la tete haute, le regard droit, avec cet air de
simplicite ingenue qui masquait ses veritables impressions, s'arretait a
quatre pas du roi et s'inclinait avec cette grace altiere qui lui etait
particuliere.
Et un fugitif sourire vint arquer ses levres narquoises, tandis que,
d'un coup d'oeil rapide, il devisageait Barba Roja, immobile et reveur
dans son encoignure, et Espinosa, plus pres.
A la vue de cette physionomie calme, presque souriante, il murmura:
"Celui-la, c'est le veritable adversaire que j'aurai a combattre.
Celui-la, seul, est redoutable."
Le resultat de ces reflexions, rapides comme un eclair, fut que
Espinosa, observateur attentif, n'aurait pu dire si la reverence de cet
extraordinaire ambassadeur s'adressait au roi, a Fausta, qui le fixait
de ses yeux ardents, ou a lui-meme.
Et le grand inquisiteur, de son cote, murmura:
"Voici un homme!"
En se courbant avec cette elegance naturelle, quelque peu hautaine,
qui constituait a elle seule une flagrante infraction aux regles de la
rigide etiquette espagnole, Pardaillan songeait encore:
"Ah! tu cherches a me faire baisser les yeux!... Ah! tu t'es decouvert
devant Mme Fausta et tu remets ton chapeau pour recevoir l'envoye du roi
de France!... Ah! tu fais trancher la tete du temeraire qui ose parler
devant toi sans ta permission! Mort-diable! tant pis..."
Et, faisant deux pas rapides vers Fausta, qui se retirait lentement,
avec ce sourire de naivete aigue qui faisait qu'on ne savait pas s'il
plaisantait:
--Quoi! vous partez, madame?... Restez donc!... Puisque le hasard nous
met tous les trois en presence, nous pourrons ainsi regler d'un coup nos
petites affaires.
Ces paroles, dites avec une cordiale simplicite, produi
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