sirent l'effet de
la foudre.
Fausta s'arreta net et se retourna, fixant tour a tour Pardaillan, comme
si elle ne le connaissait pas, et le roi pour deviner s'il n'allait pas
foudroyer a l'instant l'audacieux qui osait une telle inconvenance.
Le roi devint plus livide encore; son oeil gris lanca un eclair. Barba
Roja, lui-meme, porta la main a la garde de son epee et regarda le roi,
attendant l'ordre de frapper.
Espinosa, en reponse a l'interrogation muette du roi, eut un haussement
d'epaules et un geste qui signifiaient:
--Je vous ai averti... Laissez faire... Nous reglerons tout quand il en
sera temps.
Et le roi Philippe II, acceptant le conseil de son inquisiteur,
interesse malgre lui peut-etre par la hardiesse et la bravoure
etincelante de ce personnage qui ressemblait si peu a ses courtisans,
toujours courbes devant lui, Philippe se taisait; mais en lui-meme il
murmurait:
--Voyons jusqu'ou ira l'insolence de ce roturier!
Fausta, oubliant qu'elle avait conge, oubliant le roi lui-meme, fixait
sur Pardaillan un regard resolu, prete a relever le defi--et cependant
d'un esprit trop superieur pour ne pas admirer interieurement.
Chez Espinosa, l'admiration se traduisait par cette reflexion:
"Il faut que cet homme soit a nous a tout prix!"
Seul Pardaillan souriait de son sourire naif, ne paraissait pas
soupconner le moins du monde la tempete dechainee par son attitude et
qu'il jouait sa tete.
Et, avec la meme simplicite, s'adressant au roi:
--Je vous demande pardon, sire, je manque peut-etre a l'etiquette, mais
mon excuse est dans ce fait que notre sire, le roi de France (et il
insistait sur ces derniers mots), nous a habitues a une large tolerance
sur ces questions, quelque peu pueriles.
La position risquait de devenir ridicule, c'est-a-dire terrible pour le
roi. Il fallait, de toute necessite, reprimer ce qui lui apparaissait
comme une insolence, ou l'ecraser de son dedain.
--Faites, monsieur, comme si vous etiez devant le roi de France, dit-il,
en insistant a son tour sur ces derniers mots, avec un ton qui eut fait
rentrer sous terre tout autre que Pardaillan.
Mais Pardaillan en avait vu et entendu bien d'autres. Pardaillan,
enfin, avait resolu de piquer l'orgueil de ce roi qui lui deplaisait
outrageusement.
--Je remercie Votre Majeste de la permission qu'elle daigne m'accorder
avec tant de bonne grace, dit-il. Figurez-vous que je suis curieux de
voir de pres certain parchemin que pos
|