rembler Sixte V et a failli le renverser de son trone pontifical.
C'est une intelligence et c'est une illuminee... Elle est a menager, son
concours peut etre precieux.
--Et ce chevalier de Pardaillan?
--D'apres ce que j'en ai entendu dire, c'est une force redoutable qu'il
faudra s'attacher a tout prix ou briser impitoyablement... Mais encore
faudrait-il le voir a l'oeuvre pour le juger... D'autre part, le jour
meme de son arrivee a Seville, il s'est heurte a un de mes agents... Ce
Pardaillan l'a jete dans la rue comme on jette un objet genant...
--Il a ose porter la main sur un agent de l'Inquisition? fit le roi d'un
air de doute.
Espinosa s'inclina en signe d'affirmation.
--Alors, dit Philippe sur un ton tranchant, il faut le chatier... tout
ambassadeur qu'il est.
--Il est necessaire de savoir d'abord ce que veut et ce que peut le sire
de Pardaillan.
--Peut-etre, fit le roi, toujours glacial. Mais il est impossible de
laisser impunie l'offense faite a un agent de l'Etat... Il faut un
exemple.
--Les apparences sont sauvegardees: l'agent n'avait pas d'ordres... il a
agi de sa propre initiative et par exces de zele... C'est un manquement
a la discipline qui merite une peine severe. Quant au sire de
Pardaillan, on saura trouver un pretexte... si besoin est.
--Bien! fit le roi avec indifference.
Et, se levant, il vint, d'un pas lent et majestueux, se placer pres de
la table de travail:
--Faites introduire Mme la princesse Fausta.
Et il s'assit dans une attitude qui lui etait familiere: la jambe droite
croisee sur la jambe gauche, le coude sur le bras du fauteuil, le menton
appuye sur le poing.
Espinosa s'inclina profondement, alla transmettre les ordres du roi et
revint se placer discretement dans une embrasure, non loin de Barba
Roja.
Au meme instant, Fausta faisait son entree.
Elle s'avancait lentement, avec cette souveraine majeste qui faisait se
courber tous les fronts. Ses yeux de diamant noir se posaient sur les
yeux de Philippe qui, impassible, fige dans son immobilite voulue, la
fixait avec une insistance vraiment royale.
Seulement, tandis que, chez le roi, le regard etait froid, imperieux,
foudroyant comme un coup droit qui vise a tuer, chez Fausta, il se
montrait enveloppant, d'une douceur inexprimable et en meme temps d'une
force irresistible, qui tendait a desarmer simplement.
Fausta se courba dans la plus impeccable des reverences de la cour.
Mais, de la supreme harmoni
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