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Louis-Napoleon comme un antagoniste, et qui eussent ete contre lui,
c'est mon opinion, quoi qu'il eut fait. Sans doute, je me sentais
instinctivement entraine vers la Montagne; mais, a part ses antipathies
individuelles, je pensais sincerement qu'elle depassait le but, et
qu'elle compromettait la Republique, notamment en se rapprochant des
hommes qui approuvaient le 15 mai et les journees de juin. Restait le
tiers-parti, et je dois l'avouer franchement ici: si la Montagne avait
parfois les entrainements de mon coeur, les elans de ma raison me
rapprochaient du tiers-parti. Mais qu'est-il, ou est-il, que peut-il?
sinon attendre, pour sauvegarder le principe democratique, en apportant,
suivant les circonstances, son faible contingent contre la reaction ou
les exces. Du reste, les memes antipathies que j'ai signalees, moins
violentes, mais non moins intenses, existaient, qui peut en douter? dans
son sein.
Ces considerations, que je ne dois qu'effleurer (et c'est peut-etre
trop de hardiesse), m'inspiraient tous les jours davantage le regret
de n'avoir pu lever l'obstacle qui m'avait fait preferer mon mandat au
service actif. En verite, la direction donnee a nos armes en Italie me
prouvait que le nouveau gouvernement pouvait ordonner des operations
militaires auxquelles, a aucun prix, je n'eusse voulu prendre part. Mais
on parlait aussi d'expeditions prochaines en Afrique, cette terre ou se
sont formes tant de bons officiers. Le president, mes autres parents,
des amis plus ou moins clairvoyants m'engageaient fortement a faire
a mon corps _un acte de presence_ qui facilitat, disaient-ils, la
regularisation de ma position. On peut penser de moi ce que l'on voudra;
mais tous ceux qui connaissent un peu mes inclinations, mes habitudes et
mes antecedents, croiront sans peine qu'il n'aurait pas fallu me prier
longtemps pour me decider a faire une campagne, sans mon inconvenante
condition d'officier au titre etranger. Blesse que le gouvernement
d'un homme, a qui notre nom avait valu la premiere magistrature de
la Republique, me marchandat tant mon epaulette, je declinai toute
proposition, et la prorogation de la Legislative etant arrivee, je
retournai dans les montagnes des Ardennes belges, ou j'avais fait
un long et tranquille sejour avant la revolution. Ce qui me navrait
surtout, c'etait de voir des gens qui avaient eu leur place au soleil de
la monarchie, tandis que nous trainions dans l'exil une vie agitee ou
miserable; ce
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