n bouquet de palmiers a l'horizon, et je m'y
portai, au pas de course, avec une compagnie d'infanterie legere
d'Afrique. Suivaient les hommes de la Legion, et les travailleurs des
deux corps avec des haches. J'etais prevenu que, sur la lisiere de la
foret, M. le colonel de Barral appuierait le mouvement.
Apres avoir escalade plusieurs clotures de jardins en terre seche, longe
et traverse dans l'eau un fosse large et peu profond, nous etablimes
notre ligne de tirailleurs, le centre a environ trois cents metres de la
plaine, contre un mur crenele par les Arabes, et dans un petit jardin
encaisse et tres propre a la defensive. Entre le mur et le jardin, et au
niveau du premier, il y avait un terrain nu d'environ vingt metres de
large, ou notre ligne formait un angle saillant. Je placai en reserve, a
portee de couvrir ce point, un petit detachement de mes grenadiers,
aux ordres de leur capitaine, M. Nyko, refugie polonais, parent de
l'infortune comte Dunin, tue a Boulogne a cote de mon cousin. Cet
officier avait deja ete dangereusement blesse devant Zaatcha, lors de
l'expedition du mois de juillet dernier.
Le colonel, sans escorte et sans armes, avec cette intrepidite vraiment
corse qui le caracterise, vint voir nos dispositions, et je crus
comprendre qu'il les approuvait, a la maniere flatteuse dont il repondit
a l'assurance que je lui donnai, que le diable lui-meme ne nous
delogerait pas de la. Je prie le lecteur de remarquer que ce n'etait pas
une rodomontade, et que je tins la position jusqu'a ce que le general
m'eut envoye l'ordre d'effectuer ma retraite.
Derriere nous, nos travailleurs s'occupaient deja, avec une grande
activite, de l'abattage des palmiers. Je ne sais plus dans quel journal
j'ai lu cette assertion mirobolante, que _la hache rebondit sur l'ecorce
elastique du palmier_. Au contraire, rien n'est plus facile que de le
couper, et nos hommes y allaient grand train. Vraiment, c'etait pitie
de voir ces precieux vegetaux, la plupart centenaires, s'abattre avec
fracas, et couvrir le sol de leurs dattes. Toutes ne furent pas perdues,
comme on pense bien, et nos soldats s'en regalerent a tire-larigot.
Les Arabes, d'abord en petit nombre, exasperes de cette execution, et
craignant peut-etre une attaque sur Lichana, dont nous etions tout pres,
engagerent le combat sur notre droite. A l'extremite du mur crenele,
derriere un amas de decombres, un groupe de chasseurs du bataillon
d'Afrique soutenait vaillamment
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