on mit sa tete a un creneau
et, a l'instant meme, il recut une des plus singulieres blessures qu'on
ait jamais vues. Il fut atteint, immediatement au-dessus de l'oeil
gauche, par deux balles de petit calibre, faisant probablement partie de
la charge d'un de ces tromblons dont les assieges avaient une certaine
quantite. Ces armes, fort dangereuses de pres, n'impriment pas une tres
grande vitesse a leurs projectiles; c'est ce qui sauva notre sergent,
car, au lieu de lui briser la tete, les balles lui contournerent le
crane, et vinrent s'arreter pres de l'oreille. On le crut perdu; me
trouvant pres de lui, je lui dis, sans le croire: ce n'est rien,
sergent, vous en reviendrez bien vite. Heureusement, le fait me donna
raison; le chirurgien sonda la plaie, trouva les balles, a la surprise
des assistants, et n'eut pas de peine a les extraire. Deux ou
trois jours apres, je vis le blesse; il etait debout, et en pleine
convalescence.
Ceux qui ne les ont pas vus se feront difficilement une idee du village
de Zaatcha, et de la nature des travaux du siege, si siege il y a sans
investissement. En effet, cette place, ou plutot cette bicoque, n'avait
pu etre investie, et de nombreux contingents y entraient et en sortaient
a volonte, relevant les defenseurs, et les approvisionnant de vivres
et de munitions. Situe dans la foret de palmiers qui forme l'oasis,
entierement construit en terre seche et compacte, Zaatcha n'est, en
definitive, qu'un mauvais village a peine fortifie. Il est entoure d'un
mur de pierre, flanque, a ses saillants, par des tours ou maisons hautes
et carrees. Un fosse large et profond en defend absolument l'approche,
si ce n'est, je crois, du cote de l'ouest, ou, pour des motifs que
j'ignore, on n'avait pas encore dirige d'attaque. Le pate de maisons
en face de la tranchee m'a paru beaucoup plus eleve que le reste du
village, qui, si je ne me trompe, devait en etre defile. Les assieges
n'avaient point d'artillerie. Leur feu, quand il ne venait pas des
tours, partait des creneaux perces au-dessus du fosse, souvent au ras du
sol, dans le mur d'enceinte ou dans celui des maisons, et nous frappait
avec tant de precision et d'a-propos, qu'on ne pouvait douter qu'une
communication continue et facile, en guise de chemin couvert, n'existat
sur tout le front d'attaque.
Quand j'ai parle de tranchee, ce n'est pas qu'on eut eu a en ouvrir une
proprement dite. La surface de l'oasis est coupee, en tout sens, de
murs en pise, d
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