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mains et le visage, cela vous rafraichira." Le capitaine l'ayant
permis, l'enfant demanda ensuite la permission de le raser. Le
capitaine y ayant encore consenti, le mousse s'enhardit, et offrit a
son maitre de lui faire du the. L'offre toucha cet homme farouche,
son coeur en fut emu, une larme coula sur son visage, et il laissa
echapper ces mots en soupirant: "O amour du prochain! Que tu es
aimable au moment de la detresse! qu'il est doux de te rencontrer meme
dans un enfant!"
Le capitaine eprouva quelque soulagement par les soins de cet enfant.
Mais sa faiblesse devint plus grande, et il fut bientot convaincu
qu'il ne vivrait plus que quelques semaines. Son esprit fut assiege de
frayeurs toujours croissantes, a mesure que la mort et l'eternite se
montrerent plus pres. Il etait aussi ignorant qu'il avait ete impie.
Sa jeunesse s'etait passee parmi la plus mauvaise classe de marins;
non seulement il disait: _Il n'y a point de Dieu_, mais il agissait
aussi d'apres ce principe. Epouvante a la pensee de la mort, ne
connaissant pas le chemin qui conduit au bonheur eternel, et convaincu
de ses peches par la voix terrible de sa conscience, il s'ecria un
matin, au moment ou Robert ouvrait la porte de sa chambre, et lui
demandait amicalement: "Maitre, comment vous portez-vous ce
matin?--Ah! Robert, je me sens tres mal, mon corps va toujours plus
mal; mais je m'inquieterais bien moins de cela, si mon ame etait
tranquille. O Robert! que dois-je faire? Quel grand pecheur j'ai ete!
que deviendrai-je?..." Son coeur de pierre etait attendri. Il se
lamentait devant l'enfant, qui faisait tout son possible pour le
consoler, mais en vain.
Un jour que l'enfant venait d'entrer dans la chambre, le capitaine
s'ecria: "Robert, sais-tu prier?--Non, maitre, je n'ai jamais su que
l'oraison dominicale, que ma mere m'a apprise.--Oh! prie pour moi,
tombe a genoux, et demande grace. Fais cela, Robert, Dieu te benira."
Et tous deux commencerent a pleurer.
L'enfant, emu de compassion, tomba a genoux et s'ecria en sanglotant:
"Mon Dieu, ayez pitie de mon cher capitaine mourant! je suis un pauvre
petit matelot ignorant. Mon Dieu, le capitaine dit que je dois prier
pour lui, mais je ne sais pas comment; oh! que je regrette qu'il n'y
ait pas sur le batiment un pretre qui puisse me l'apprendre, qui
puisse prier mieux que moi, qui puisse recevoir la confession de ses
peches et les pardonner en votre nom. Il croit qu'il sera perdu: mon
Dieu, sauvez
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