Un moment apres, le venerable cure que nos lecteurs connaissent deja,
se rendait aux instances de Mme X*** et franchissait de nouveau, sans
hesitation, le seuil d'une demeure ou il avait recu naguere un si
cruel outrage.
O religion sainte, voila tes oeuvres! Ce saint vieillard a tout
oublie, tout pardonne, et il vient consoler et benir, il vient ouvrir
le ciel a celui qui avait failli l'assassiner.
Ce fut Mme X*** qui introduisit le pasteur aupres du moribond.
A l'aspect de ces cheveux blancs, de ce front tout empreint d'une
majeste simple et imposante, sous l'influence de ce regard toujours
grave, toujours calme, toujours bienveillant, mille souvenirs
surgirent spontanement dans l'ame de X***, et, soulevant la tete avec
effort, il voulut s'incliner devant le noble vieillard.
--Est-ce bien vous, monsieur, dit-il d'une voix faible, est-ce bien
vous qui daignez venir jusqu'a moi?
--Oui, c'est moi, dit le pretre avec bonte.
--Je ne l'esperais pas, monsieur. Pouvais-je l'esperer apres l'outrage
dont je me suis rendu coupable envers vous?
Puis, apres un moment de silence:
--Ah! monsieur l'abbe, dites-le-moi, venez-vous ici pour me pardonner
ou pour me maudire?
--Mon fils, le pretre ne maudit jamais, il ne sait que benir. Je vous
benis et je vous pardonne!
Mme X*** etait la. A ces dernieres paroles, son coeur s'emut, ses
larmes coulerent, et, pour eviter d'augmenter par son emotion
l'emotion du malade, elle quitta l'appartement avec discretion et
prudence.
Alors, son epoux tournant vers le pretre un regard ou se peignaient
tour a tour et la reconnaissance et l'admiration:
--Merci, monsieur, merci! Je mourrai maintenant moins malheureux,
puisque j'ai obtenu un pardon que je n'osais meme pas implorer.
--Ne parlons plus de moi, repondit le ministre du ciel; mon pardon
n'est rien, mon ami, ou bien peu de chose; je vous en apporte un
autre, autrement precieux, autrement desirable, celui de Dieu
lui-meme. C'est lui qu'il faut aimer, lui qu'il faut benir. Voyez!
jusque dans ses chatiments il se montre bon pere; c'est lui qui a
fait naitre en vous mon souvenir, lui encore qui me conduit ici pour
consoler votre souffrance. Que vos larmes montent jusqu'a lui, voici
l'heure de la reconciliation!
Et le pretre s'approcha bien pres du lit du mourant.
Dieu seul entendit les aveux du coupable et les paroles consolatrices
du pretre. Ce que nous savons, nous, c'est que les aveux de l'un
furent souvent inter
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