n etat que l'habitude d'assaisonner
toutes mes phrases du fameux _sapristi_, ce qui me fait appeler par
tout le monde ici le capitaine _Sapristi_. Si je raconte volontiers
mon histoire, c'est dans l'esperance qu'elle pourra detourner du mal,
et de la mauvaise habitude de jurer, quelques personnes aussi
coupables que je l'etais alors.[1]"
[Note 1: Cite dans les _Petites lectures_, bulletin populaire
des Conferences de Saint-Vincent-de-Paul.--Nous n'avons pu verifier
nous-meme, on le comprend, l'authenticite des traits que nous avons
puises dans d'autres Recueils; mais pourquoi la mettre en doute: Il
est certain qu'il s'opere frequemment des conversions tout aussi
extraordinaires que celle-la; le pretre n'y prend meme plus garde dans
les pays de foi, tant il est souvent temoin de ces merveilles, et
elles restent un secret entre l'homme et Dieu.]
* * * * *
5.--LA VENGEANCE D'UN ETUDIANT CHRETIEN.
Sous Louis-Philippe, ecrit Armand de Pontmartin, l'esprit d'irreligion
regnait dans les colleges de Paris. Il y avait pourtant des
exceptions... la plus originale et la plus touchante m'etait apparue
sous les traits de Paul Savenay, natif de Guerande. Doue, ou plutot
arme d'une piete angelique et robuste tout ensemble, il bravait le
respect humain, defiait la raillerie, et il aurait mis au besoin tout
l'entetement de sa race pour affronter la persecution et le martyre.
Cette piete se revelait jusque sur son visage, qui prenait une
expression celeste au moment de la priere. Ainsi, lorsque, sur un
signe de notre professeur indolent, je recitais, au debut et a la
fin de la classe, le _Veni Sancte Spiritus_ et le _Sub tuum
praesidium_, c'etait pour presque tous les eleves, le signal d'un
concert charivarique d'eternuements, de quintes de toux, de pupitres
disloques, et de dictionnaires tombant a grand bruit. Paul Savenay
s'isolait de ce tapage, et l'on pouvait suivre sur sa figure le
sourire de la sainte Vierge dont il implorait la protection, et le
contact de l'Esprit-Saint qui l'effleurait de ses ailes.
Cette piete fervente l'avait fait prendre en grippe par le plus
mauvais sujet de la classe, fanfaron d'impiete et de libertinage,
liseur et colporteur des livres de Parny et de Voltaire, et pourtant
Breton comme Paul; mais entendons-nous, ce Breton-la, nomme Jacques
Fael, etait un Breton de contrebande. On disait que son pere, Nantais
d'origine, avait pris part a quelques-unes des plu
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