au-dessous de sa valeur. Il en a trop d'envie, ne craignez rien.
--Je vous repete, mon ami, que je ne saurai pas soutenir cette lutte,
et que, depuis deux jours qu'elle dure, elle est deja au-dessus de mes
forces.
--Aussi, ne faut-il pas vous en meler. Vous allez remettre vos affaires
a un notaire honnete et habile. J'en connais un; j'irai lui parler ce
soir, et vous le verrez demain, sans vous deranger. C'est demain la fete
patronale de Blanchemont. Il y a grande assemblee sur le terrier devant
l'eglise. Le notaire viendra s'y promener et causer, suivant l'habitude,
avec ses clients de la campagne; vous entrerez comme par hasard dans
une maison ou il vous attendra. Vous signerez une procuration, vous
lui direz deux mots, je lui en dirai quatre, et vous n'aurez plus qu'a
renvoyer M. Bricolin batailler avec lui. S'il ne se rend pas, pendant ce
temps-la votre notaire vous aura trouve un autre acquereur. Il n'y aura
qu'un peu de prudence a garder pour que le Bricolin ne se doute pas que
je vous ai indique cet homme d'affaires au lieu du sien, qu'il vous a
sans doute propose, et que vous avez peut-etre fait la folie d'accepter!
--Non! je vous avais promis de ne rien faire sans vos conseils.
--C'est bien heureux! Allez donc demain, a deux heures sonnant, vous
promener au bord de La Vauvre, comme pour voir du bas du terrier le joli
coup d'oeil de la fete. Je serai la et je vous ferai entrer chez une
personne sure et discrete.
--Mais, mon ami, si M. Bricolin decouvre que vous me dirigez dans cette
affaire contre ses interets, il vous chassera de sa maison, et vous ne
pourrez jamais revoir Rose.
--Il sera bien fin s'il le decouvre! Mais si ce malheur arrivait...
je vous l'ai dit, madame Marcelle, Dieu me viendrait en aide par un
miracle, d'autant plus que j'aurais fait mon devoir.
--Ami loyal et courageux, je ne puis me resoudre a vous exposer ainsi.
--Et je ne vous dois pas cela quand vous vouliez vous ruiner pour moi?
Allons, pas d'enfantillage, ma chere dame, nous sommes quittes....
--Voici Rose qui vient vers nous, dit Marcelle. Il me reste a peine le
temps de vous remercier....
--Non! mademoiselle Rose tourne du cote de l'avenue avec ma mere, qui a
le mot pour la retenir un peu, car je n'ai pas fini, madame Marcelle,
j'ai bien autre chose a vous dire! Mais vous devez etre lasse de marcher
si longtemps. Puisque la cour est libre et le moulin silencieux, venez
vous asseoir sur ce banc aupres de la porte.
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