chez les maitres de la scolastique,
nous reconnaissons des Euthydeme et des Protagoras, quelquefois
Democrite, Empedocle ou Parmenide, ca et la des idees de Platon, partout
le souvenir et l'imitation d'Aristote. Sans doute le moyen age morcelait
la philosophie; mais toutes les parties s'en tiennent si etroitement
qu'on ne peut longtemps en isoler une, et des voies differentes y
ramenent au meme point. L'esprit humain n'innove guere que dans les
methodes, et les methodes diversifient, mais ne detruisent pas son
identite. Les idees sur lesquelles porte la philosophie se presentent
comme d'elles-memes a la reflexion. Des que l'esprit se regarde, il les
retrouve. C'est un heritage substitue de generation en generation, comme
ces pierres precieuses qui se perpetuent dans les familles, et dont
la disposition seule change suivant la mode et le gout des diverses
epoques. Indestructibles, et inalterables, ces idees demeurent dans
l'esprit humain comme des symboles de l'eternelle verite.
Elles ne manquent donc a aucune grande philosophie; et elles peuvent
etre decouvertes sous tous les voiles que les caprices du raisonnement
leur ont pretes. Il est curieux et piquant parfois de les reconnaitre,
malgre les deguisements dont les revetent la philosophie et la theologie
de nos peres. Cet interet nous soutenait dans la tache ingrate de
penetrer au fond de ces deux sciences, d'en reproduire les idees et les
expressions, de leur rendre, s'il nous etait possible, la vie et la
lumiere. Cette restauration etait une oeuvre assez nouvelle. Depuis
quelques annees, on a bien su ressaisir avec sagacite le sens intime de
toutes les doctrines, on les a traduites avec succes dans une langue
commune, celle de la critique contemporaine. Mais a peine a-t-on ose,
dans de courts passages, faire revivre l'enseignement original des
maitres du passe. A peine celui qui a le premier parmi nous entrepris de
retirer la scolastique d'un oubli de deux siecles, a-t-il ose lui rendre
a certains moments et ses formes et son style. Par le choix de notre
sujet, par l'etendue de notre travail, nous avons du nous jeter
audacieusement dans cette oeuvre de restitution scientifique. Nous
sommes rentre dans la nuit du moyen age, pour y marcher le flambeau a
la main. Un historien dont la science profonde est vivifiee par une
puissante imagination, a su ranimer les sentiments et les moeurs de
la societe de ces temps-la. Il a remis sur ses pieds le Germain, le
Gaulois, le S
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