emercier le Tout-Puissant
de son adresse remarquable; il a envoye la foudre de maniere a couper
precisement mon visage en deux, a partir du front, endroit ou la blessure
a ete le plus dangereuse: qu'un autre le felicite! Mais, les orages
attaquent quelqu'un de plus fort qu'eux. Ainsi donc, horrible Eternel,
a la figure de vipere, il a fallu que non-content d'avoir place mon ame
entre les frontieres de la folie et les pensees de fureur qui tuent d'une
maniere lente, tu aies cru, en outre, convenable a ta majeste, apres un
mur examen, de faire sortir de mon front une coupe de sang!... Mais,
enfin, qui te dit quelque chose? Tu sais que je ne t'aime pas, et qu'au
contraire je te hais: pourquoi insistes-tu? Quand ta conduite voudra-t-elle
cesser de s'envelopper des apparences de la bizarrerie? Parle-moi
franchement, comme a un ami: est-ce que tu ne te doutes pas, enfin, que tu
montres, dans ta persecution odieuse, un empressement naif, dont aucun de
tes seraphins n'oserait faire ressortir le complet ridicule? Quelle colere
te prend? Sache que, si tu me laissais vivre a l'abri de tes poursuites,
ma reconnaissance t'appartiendrait ... Allons, Sultan, avec ta langue,
debarrasse-moi de ce sang qui salit le parquet. Le bandage est fini: mon
front etanche a ete lave avec de l'eau salee, et j'ai croise des
bandelettes a travers mon visage. Le resultat n'est pas infini: quatre
chemises, pleines de sang et deux mouchoirs. On ne croirait pas, au premier
abord, que Maldoror contint tant de sang dans ses arteres; car, sur sa
figure, ne brillent que les reflets du cadavre. Mais, enfin, c'est comme
ca. Peut-etre que c'est a peu pres tout le sang que put contenir son corps,
et il est probable qu'il n'y en reste pas beaucoup. Assez, assez, chien
avide; laisse le parquet tel qu'il est: tu as le ventre rempli. Il ne
faut pas continuer de boire: car, tu ne tarderais pas a vomir. Tu es
convenablement repu, va te coucher dans le chenil; estime-toi nager dans
le bonheur; car, tu ne penseras pas a la faim, pendant trois jours
immenses, grace aux globules que tu as descendues dans ton gosier, avec
une satisfaction solennellement visible. Toi, Leman, prends un balai: je
voudrais aussi en prendre un, mais je n'en ai pas la force. Tu comprends,
n'est-ce pas, que je n'en ai pas la force? Remets tes pleurs dans leur
fourreau; sinon, je croirai que tu n'as pas le courage de contempler,
avec sang-froid, la grande balafre, occasionnee par un supplice deja
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