mees s'etant rassemblees, l'action
devint generale. Sitot que les deux rois parurent, on entendit crier:
_Montjoye! Saint-Denis!_ de la part des Francais; et _Realistes!_ de
celle des Anglais. On combattit de part et d'autre avec un acharnement
extraordinaire, et tel qu'on devait l'attendre de deux partis animes,
l'un par la victoire du jour precedent, et l'autre par le desir de
reparer sa perte. On se battait dans un pays fort peu propre a une
bataille, embarrasse de vignobles et plein de defiles, ou il etait
impossible de s'etendre; de sorte que c'etait plutot une infinite de
petits combats qui se donnaient, qu'une bataille reguliere. La victoire
fut long-temps douteuse, par l'opiniatre resistance des Anglais, parmi
lesquels Simon de Montfort, comte de Leicester, se distingua beaucoup.
Mais Louis qui se trouvait partout, seconde par la noblesse de France,
presque toujours invincible lorsqu'elle est d'intelligence avec son
souverain, combattit avec tant de valeur et de conduite, que l'ennemi
plia de tous cotes, et fut repousse jusque sous les murailles de
Saintes, ou le roi d'Angleterre se sauva, laissant la victoire et le
champ de bataille aux Francais.
Le nombre des morts n'est pas connu; mais il dut etre grand, a en
juger par la maniere dont les historiens parlent de l'ardeur et de
l'opiniatrete des combattans. Le seigneur Henri de Hastinges, vingt
autres seigneurs anglais et une grande partie de l'infanterie ennemie,
furent fait prisonniers par les Francais. Le seigneur Jean Desbarres
avec six chevaliers, et quelques autres, furent pris par les Anglais.
Cette seconde victoire, remportee par le roi en personne, reduisit les
ennemis a la derniere extremite, et forca le comte de la Marche a songer
a la paix. Il envoya secretement un de ses confidens a Pierre, comte de
Bretagne, l'ancien complice de ses premieres revoltes, qui etait dans le
camp du roi. Il le pria de menager son accommodement tel qu'il plairait
a sa majeste de lui accorder, et lui donna ses pleins pouvoirs a cet
effet. Le comte de Bretagne, sans rien demander en particulier, obtint
le pardon du comte de la Marche, aux conditions qu'il plut au roi de
prescrire. Elles furent facheuses; mais en meme temps l'effet d'une
grande clemence du roi, qui etait en pouvoir et en droit de depouiller
ce seigneur rebelle de tous ses etats. Ces conditions etaient que toutes
les places que le roi avait prises sur le comte et la comtesse de la
Marche lui demeureraient
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