Madame jusqu'a sept
heures et demie. C'est moi qu'on ne prendrait pas maintenant a etre
prete a l'heure. Je fais mon diner pour huit heures, moi, et quand on
l'attend, tant pis, un roti ne doit pas etre brule!
M. Parent feignait de ne point ecouter. Il murmura: "C'est bon, c'est
bon. Il faut laver les mains de Georges qui a fait des pates de sable.
Moi, je vais me changer. Recommande a la femme de chambre de bien
nettoyer le petit."
Et il entra dans son appartement. Des qu'il y fut, il poussa le verrou
pour etre seul, bien seul, tout seul. Il etait tellement habitue,
maintenant, a se voir malmene et rudoye qu'il ne se jugeait en surete
que sous la protection des serrures. Il n'osait meme plus penser,
reflechir, raisonner avec lui-meme, s'il ne se sentait garanti par un
tour de clef contre les regards et les suppositions. S'etant affaisse
sur une chaise pour se reposer un peu avant de mettre du linge propre,
il songea que Julie commencait a devenir un danger nouveau dans la
maison. Elle haissait sa femme, c'etait visible; elle haissait surtout
son camarade Paul Limousin reste, chose rare, l'ami intime et familier
du menage, apres avoir ete l'inseparable compagnon de sa vie de garcon.
C'etait Limousin qui servait d'huile et de tampon entre Henriette et
lui, qui le defendait, meme vivement, meme severement, contre les
reproches immerites, contre les scenes harcelantes, contre tontes les
miseres quotidiennes de son existence.
Mais voila que, depuis bientot six mois, Julie se permettait sans cesse
sur sa maitresse des remarques et des appreciations malveillantes. Elle
la jugeait a tout moment, declarait vingt fois par jour: "Si j'etais
Monsieur, c'est moi qui ne me laisserais pas mener comme ca par le nez.
Enfin, enfin... Voila... chacun suivant sa nature."
Un jour meme elle avait ete insolente avec Henriette, qui s'etait
contentee de dire, le soir, a son mari: "Tu sais, a la premiere
parole vive de cette fille, je la flanque dehors, moi." Elle semblait
cependant, elle qui ne craignait rien, redouter la vieille servante; et
Parent attribuait cette mansuetude a une consideration pour la bonne qui
l'avait eleve, et qui avait ferme les yeux de sa mere.
Mais c'etait fini, les choses ne pourraient trainer plus longtemps;
et il s'epouvantait a l'idee de ce qui allait arriver. Que ferait-il?
Renvoyer Julie lui apparaissait comme une resolution si redoutable,
qu'il n'osait y arreter sa pensee. Lui donner raison contre s
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