aissance jusqu'a aujourd'hui! Je crois
qu'on peut dire que je suis devouee a la famille...
Elle attendit une reponse.
Parent balbutia: "Mais oui, ma bonne Julie."
Elle reprit:--Vous savez bien que je n'ai jamais rien fait par interet
d'argent, mais toujours par interet pour vous; que je ne vous ai jamais
trompe ni menti; que vous n'avez jamais pu m'adresser de reproches...
--Mais oui, ma bonne Julie.
--Eh bien, Monsieur, ca ne peut pas durer plus longtemps. C'est par
amitie pour vous que je ne disais rien, que je vous laissais dans
votre ignorance; mais c'est trop fort, et on rit trop de vous dans le
quartier. Vous ferez ce que vous voudrez, mais tout le monde le sait; il
faut que je vous le dise aussi, a la fin, bien que ca ne m'aille guere
de rapporter. Si Madame rentre comme ca a des heures de fantaisie, c'est
qu'elle fait des choses abominables.
Il demeurait effare, ne comprenant pas. Il ne put que balbutier:
"Tais-toi... Tu sais que je t'ai defendu..."
Elle lui coupa la parole avec une resolution irresistible.
--Non, Monsieur, il faut que je vous dise tout, maintenant. Il y a
longtemps que Madame a faute avec M. Limousin. Moi, je les ai vus plus
de vingt fois s'embrasser derriere les portes. Oh, allez! si M. Limousin
avait ete riche, ca n'est pas M. Parent que Madame aurait epouse. Si
Monsieur se rappelait seulement comment le mariage s'est fait, il
comprendrait la chose d'un bout a l'autre...
Parent s'etait leve, livide, balbutiant: "Tais-toi... tais-toi... ou..."
Elle continua:
--Non, je vous dirai tout. Madame a epouse Monsieur par interet; et elle
l'a trompe du premier jour. C'etait entendu entre eux, pardi! Il suffit
de reflechir pour comprendre ca. Alors comme Madame n'etait pas contente
d'avoir epouse Monsieur qu'elle n'aimait pas, elle lui a fait la vie
dure, si dure que j'en avais le coeur casse, moi qui voyais ca...
Il fit deux pas, les poings fermes, repetant: "Tais-toi... tais-toi..."
car il ne trouvait rien a repondre.
La vieille bonne ne recula point; elle semblait resolue a tout.
Mais Georges, effare d'abord, puis effraye par ces voix grondantes, se
mit a pousser des cris aigus. Il restait debout derriere son pere, et,
la face crispee, la bouche ouverte, il hurlait.
La clameur de son fils exaspera Parent, l'emplit de courage et de
fureur. Il se precipita vers Julie, les deux bras leves, pret a frapper
des deux mains, et criant: "Ah miserable! tu vas tourner les sens du
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