mante qui lui etait
familiere, et serrant le bras de sa compagne:
-- Remercie le roi, dit-elle.
-- Oui, oui, mais M. de Buckingham est jaloux. Prends garde!
repliqua Stewart.
Ces mots etaient a peine prononces, que M. de Buckingham sortait
de l'un des pavillons de la terrasse et, s'approchant des deux
femmes avec un sourire:
-- Vous vous trompez, miss Lucy, dit-il, non, je ne suis pas
jaloux, et la preuve, miss Mary, c'est que voici la-bas celui qui
devrait etre la cause de ma jalousie, le vicomte de Bragelonne,
qui reve tout seul. Pauvre garcon! Permettez donc que je lui
abandonne votre gracieuse compagnie pendant quelques minutes,
attendu que j'ai besoin de causer pendant ces quelques minutes
avec miss Lucy Stewart.
Alors, s'inclinant du cote de Lucy:
-- Me ferez-vous, dit-il, l'honneur de prendre ma main pour aller
saluer le roi, qui nous attend?
Et, a ces mots, Buckingham, toujours riant, prit la main de miss
Lucy Stewart et l'emmena.
Restee seule, Mary Graffton, la tete inclinee sur l'epaule avec
cette mollesse gracieuse particuliere aux jeunes Anglaises,
demeura un instant immobile, les yeux fixes sur Raoul, mais comme
indecise de ce qu'elle devait faire. Enfin, apres que ses joues,
en palissant et en rougissant tour a tour, eurent revele le combat
qui se passait dans son coeur, elle parut prendre une resolution
et s'avanca d'un pas assez ferme vers le banc ou Raoul etait
assis, et revait comme on l'avait bien dit.
Le bruit des pas de miss Mary, si leger qu'il fut sur la pelouse
verte, reveilla Raoul; il detourna la tete, apercut la jeune fille
et marcha au-devant de la compagne que son heureux destin lui
amenait.
-- On m'envoie a vous, monsieur, dit Mary Graffton; m'acceptez-
vous?
-- Et a qui dois-je etre reconnaissant d'un pareil bonheur,
mademoiselle, demanda Raoul.
-- A M. de Buckingham, repliqua Mary en affectant la gaiete.
-- A M. de Buckingham, qui recherche si passionnement votre
precieuse compagnie! Mademoiselle, dois-je vous croire?
-- En effet, monsieur, vous le voyez, tout conspire a ce que nous
passions la meilleure ou plutot la plus longue part de nos
journees ensemble. Hier, c'etait le roi qui m'ordonnait de vous
faire asseoir pres de moi, a table; aujourd'hui, c'est
M. de Buckingham qui me prie de venir m'asseoir pres de vous, sur
ce banc.
-- Et il s'est eloigne pour me laisser la place libre? demanda
Raoul, avec embarras.
-- Regardez la-bas, au detour de
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