nstant Octave, puis ses yeux tomberent sur moi
apres avoir erre vaguement sur les personnes presentes. Un feu sombre et
terrible les eclairait. C'etait les derniers jets de lumiere de la
lampe qui s'eteint. Surpris d'abord, ils prirent bientot une fixite
extraordinaire. Je sentais qu'ils plongeaient jusqu'aux derniers replis
de mon ame comme s'ils eussent voulu en penetrer les secrets. De plus en
plus, de ternes et maladifs qu'ils etaient auparavant, ils devenaient
intelligents et percants. Je ne sais ce qui se passait au dedans d'elle,
mais je comprenais qu'il y avait quelque chose de surnaturel, et qu'elle
lisait au dedans de moi comme dans un livre ouvert. Le feu qui sortait
sous ses prunelles me brulait, me devorait, et j'aurais donne tout le
monde pour pouvoir m'y soustraire.
Sous ce regard ardent, mes dents claquaient, dans ma bouche, un
fremissement se fit sentir dans tous mes membres, et malgre l'empire que
j'avais sur moi-meme, je tremblais et une sueur abondante se repandit
sur tout mon corps.
Je le voyais, elle me reconnaissait et devinait tout. Je ne sais ce qui
fut advenu, si ses paupieres ne se fussent fermees. Bien que son regard
n'eut pas ete long, il m'avait exprime tout ce qu'il y avait eu dans ma
conduite de mechancete et de sceleratesse. Je profitai toutefois de
ce moment pour me refugier dans un coin de la chambre d'ou je pouvais
l'observer sans qu'elle ne me vit.
Pendant, ce temps, tout le monde etait silencieux, le pretre seul priait
tout bas aupres de leurs chevets.
Peu d'instants apres, la mere ouvrit de nouveau ses yeux et les tourna
vers l'endroit que je venais de laisser. Angeline avait pris ma place.
Elle la couvrit a son tour de son regard brillant, mais maintenant
lucide. Elle la fixa longtemps. Jamais je ne pourrai decrire le
changement d'expression qui s'opera soudainement. Ce fut comme un rayon
celeste d'esperance et d'amour d'abord, puis de bonheur ineffable, il
passa et s'eteignit comme l'eclair. Elle ferma de nouveau les yeux pour
se recueillir encore un moment, et fit signe a la vieille servante
d'approcher plus pres d'elle, lui murmura quelques mots a l'oreille. Ces
quelques mots que nous n'entendimes pas nous parurent etre un ordre.
Celle-ci vint prendre Angelique qui fondait en larmes, et la conduisit
aupres du lit. Marguerite la contempla un instant avec une expression
que je ne puis decrire, et que vous ne sauriez jamais imaginer; puis,
d'un bond, elle fut sur son seant
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