u gouverneur par lequel il m'invitait a passer chez lui.
Il avait entendu raconter tout ce qui etait arrive depuis la veille. On
lui avait aussi redit dans les plus minutieux details la scene aux pieds
de l'echafaud et les declarations des jures, il en etait profondement
affecte. Il se reprochait amerement de ne m'avoir pas donne audience la
veille. Il s'accusait meme d'etre coupable de la mort de mon malheureux
ami en ayant trop tarde a envoyer le sursis, mais il pensait que
l'execution n'aurait lieu qu'a sept heures. Il m'offrit ensuite comme
compensation une forte somme d'argent pour qu'elle fut remise a la
famille du supplicie. Je la refusai en leur nom de la maniere la plus
peremptoire et lui dis avec amertume en decouvrant ma poitrine, que si
les blessures dont j'etais couvert et le sang que j'avais verse pour
la patrie n'avaient pas meme pu me procurer une audience de quelques
instants pour sauver un innocent, du moins il pourraient servir a leur
assurer le bien-etre et le confort materiel, puisque j'avais amasse des
sommes considerables que je leur destinais.
La dessus je pris conge de lui apres qu'il m'eut assure que par un edit
qu'il allait publier, il proclamerait l'innocence d'Attenousse.
J'allai ensuite faire mes adieux a Monsieur Odillon. Il n'etait pas
encore remis des secousses qu'il avait eprouvees. Il put cependant
trouver quelques paroles de consolation et d'encouragement, et ce fut,
avec la plus grande emotion que nous nous separames.
ANGELINE.
La voie qui me restait a suivre etait desormais toute tracee. Reparer
le mal que j'avais fait, tel etait mon devoir et la determination
que j'avais prise. Je suis heureux aujourd'hui du temoignage de ma
conscience qui me dit que je n'ai pas forfait a mon serment.
Il me fallait, aller rejoindre Angeline. L'affreux malheur qui etait
venu fondre sur elle me l'avait rendu encore plus chere, s'il etait
possible, car a l'amour paternel que je lui portais rejoignait un
sentiment d'incommensurable pitie.
Je passai le reste de la journee a acheter des provisions en abondance
ainsi que des etoffes et des vetements de toutes sortes. Le lendemain
matin, accompagne de quatre hommes vigoureux que j'avais choisis et
engages, je me dirigeai vers le Lac St. Jean ou je devais la rencontrer.
Nous marchames pondant quatre jours et quatre nuits sans prendre que
justement le temps necessaire pour les repas et le repos qui nous
etaient indispensables, j'avais hat
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