ons du fou lorsqu'un
nom que celui-ci prononca attira son attention: "Paulo est mort, c'etait
mon complice." A ce nom, le louche, je ne savais pourquoi, fit un
soubresaut comme s'il eut ete pique par une vipere. Je le vis palir
et frissonner imperceptiblement, mais se remettant bientot, d'un
air degage, il alla prendre la chandelle sur la table et, tout en
s'excusant, il l'approcha du mendiant et le regarda longtemps.
Celui-ci dormait du plus profond sommeil, un peu d'ecume meme lui
sortait de la bouche. "Je pensais, dit-il, en posant la lumiere a
sa place, que le malheureux etait malade, j'avais cru l'entendre se
plaindre."
Je remarquai toutefois que des ce moment, le louche devint taciturne.
Bien que l'heure ne fut pas tres avance, il nous souhaita le bonsoir
et partit. Peu d'instants apres son depart, le mendiant se leva et se
trainant apres les meubles, le jarret pliant, d'un pas titubant; il se
dirigea vers la porte que je fus oblige de lui ouvrir tant il n'y voyait
rien. A peine etait-il dehors qu'on entendit le cri du merle siffleur.
Bientot apres, le fou rentra en trebuchant, se recoucha, en peu
d'instant ses ronflements sonores recommencerent.
Mes voisins se retirerent en nous disant bonne nuit a la vieille mere et
a moi. Tout en allant les reconduire, je fermai les contrevents, pendant
que ma vieille indienne Aglaousse, eteignait les lumieres trop vives.
Elle aussi avait reconnu Baptiste, mais moi seul avait pu le remarquer
sur sa figure.
Quand je rentrai, une entiere transformation s'etait faite chez le fou
apparent. Il avait ote sa perruque, fait disparaitre une partie de ses
haillons; il causait familierement avec l'Indienne et n'etait pas
plus ivres qu'un homme qui n'a bu que de l'eau. C'etait aussi ce que
contenait la bouteille.
Nous tombames dans les bras l'un de l'autre et apres quelques
informations, Baptiste s'empressa de me dire qu'il n'y avait aucun
danger pour Adala du moins pour quelques jours.
Il me raconta le resultat de sa chasse a l'homme.
Depuis au-dela de huit mois qu'ils poursuivaient Paulo et son digne
acolyte, il n'y avait eu que ruses et embuches des deux cotes. C'etait a
qui surprendrait et ne serait pas surpris.
Les deux scelerats avaient pris tous les moyens possibles pour que leurs
traces ne fussent pas reconnues. Afin de faire perdre leurs pistes, ils
avaient souvent monte et redescendu dans le cours des ruisseaux des
distances considerables. Aussi les chasseurs eu
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