que son excessive fatigue lui fait couler
des sueurs qui se repandent sur ses joues. Ces sueurs ne sont pourtant
que des larmes.
Nobles coeurs qui pleurent au souvenir de cette triste fin et sur
le sort d'hommes qui les auraient massacres s'ils en avaient trouve
l'occasion.
Je vais leur en epargner le recit, car Baptiste m'a remis deux lettres
et un cahier; l'un est du geolier, l'autre de monsieur Odillon.
Avant que de partir de Quebec, j'avais paye le geolier liberalement pour
qu'il donnat un acces aussi libre que possible au venerable pretre que
j'ai prie instamment, par une lettre de se rendre aupres des prisonniers
et de veiller au salut de leurs ames. De Paulo surtout que je n'ai
malheureusement que trop contribue a perdre. C'est une legere reparation
et un dernier effort que je veux tenter pour le ramener au bien.
Mon bon ami m'a repondu qu'il se mettait de suite en route et qu'il me
tiendrait au courant de ce qui se passerait dans la prison jusqu'au
jour de l'execution, suivant le desir que je lui en avais exprime. En
attendant son arrivee, le geolier s'etait engage a me rendre un compte
exact de la conduite et des dispositions des condamnes.
Le repas termine, j'invite mes amis a s'etendre sur leurs lits. Peu
de minutes apres le Gascon et le Normand ronflaient a pleins poumons,
tandis que Baptiste se tourne de mon cote et semble se consulter
interieurement. Il a certainement quelque chose d'important a me dire,
car il me regarde en pleine figure et balbutie quelques paroles sans
suite.
Enfin il se decide a s'approcher de moi en disant: "Ne me grondez pas
trop fort, Pere Helika, mais avant que de revenir j'ai ete LA voir et
ELLE m'a reconnu. Oh! la chere enfant qu'elle est belle et comme elle
ma demande avec empressement de vos nouvelles. Puis sans me laisser
le temps d'ajouter un mot! Et les bonnes religieuses, et la mere
d'Attenousse qui se trouvait la, avec quelle anxiete elles se sont
informees de vous! Nom d'un nom! Je ne suis pourtant pas une Madeleine,
mais vrai, j'ai ete trop bete pour leur repondre. J'etais, comment vous
dirai-je, tenez aussi incapable de parler que quand ma pauvre mere me
dit dans ses derniers moments en m'embrassant: Baptiste, je vois te
laisser pour toujours, mais Dieu prendra soin de toi. Sois honnete et
religieux avant tout. Je ne pus dire un seul mot. A travers mes larmes,
je voyais tout danser et tourbillonner autour de moi. Je m'agenouillai
seulement pour recevoir sa
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