es sur
ma figure, l'endroit d'ou je venais et le personnel de la maison que
j'occupais; puis, sur les reponses de la femme, ils avaient echange
entre eux quelques paroles precipitees et avaient deserte sans ajouter
rien de plus. La terreur qu'ils inspiraient etait devenue universelle.
Une battue generale avait ete faite dans toutes les montagnes et les
forets d'alentour sans aucun resultat.
Ce qui jusqu'alors n'avait ete que soupcon pour moi devint certitude;
plus moyen d'en douter, c'etait Paulo et ses complices. Paulo
connaissait mon lieu de retraite, peut-etre savait-il aussi que je
m'etais fait le protecteur d'Adala et chercherait-il a exercer contre
l'enfant d'Angeline la meme vengeance que j'avais tiree de sa grand'mere
de son refus de m'epouser.
Ne pouvant tenir plus longtemps a cet etat d'anxiete, qui soulevait
d'avantage mon desir de gagner les bois pour me mettre a leur recherche,
tout en chassant, je partis un bon jour apres avoir mis Adala et sa
grand'mere hors des atteintes d'un coup de main par lequel on aurait
tente quelque chose contre elles.
Cette vie nomade et libre du sauvage me convenait, parce qu'au milieu de
mes compatriotes, les blancs, j'avais vu se derouler les plus douloureux
evenements de ma vie et j'y retrouvais a chaque pas, aupres de leurs
demeures, des souvenirs de mon enfance, de ma jeunesse, mais par-dessus
tout de mes parents sans compter de cuisants remords. Il me semblait que
seul encore, assis aux pieds des grands arbres ou j'entendrais la voix
toute-puissante de Dieu, je sentirais un peu de calme renaitre en mon
ame.
Dans le recueillement des forets on retrouve, au milieu de la privation
de la vie sauvage, les souvenirs si chers du foyer. Ils etaient pour moi
si remplis de charmes que j'esperais les revoir encore dans le silence
profond et l'isolement. La j'y reverrais mon pere conduisant peniblement
sa charrue, mais tout joyeux a l'idee que c'etaient autant de sueurs
epargnees au front de son enfant. J'y reverrais encore ma vieille et
sainte mere travaillant pour moi et mes cheres jeunes soeurs s'ingeniant
a trouver ce qu'elles pouvaient faire pour me prouver leur amour et leur
desir de m'etre agreables. L'amour qu'on me portait dans, cet asile
fortune se deteignait sur tout le personnel de la ferme, les bons
domestiques, les servantes me comblaient eux aussi d'attentions. Il n'y
avait pas meme jusqu'aux animaux dont je repassais les noms dans ma
memoire, qui ne replissass
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