e n'etais plus enfin qu'a quelques pas de l'habitation, lorsque la
porte s'ouvrit et deux femmes parurent sur le seuil. L'une d'elles
tenait une carabine, l'autre pressait un jeune enfant sur sa poitrine.
Toutes deux avaient ete eveillees en sursaut par le bruit inusite et
craignaient sans doute une attaque de quelques tribus ennemies, attaques
qui n'etaient que trop frequentes dans ces temps-la. Je les reconnus du
premier coup d'oeil; c'etaient la mere d'Attenousse et mon Angeline.
Mes forces voulurent m'abandonner, mais je reussis a prendre le
dessus.--Helika, s'ecria la vieille en se reculant epouvantee pendant
qu'Angeline s'elancant a ma rencontre venait jeter son enfant dans mes
bras et me sauter au cou. Je les pressai un instant toutes deux sur mon
coeur.
--Pere, me dit Angeline, je t'attendais. Va-t-il bientot nous revenir?
Elle n'osait prononcer le nom de son epoux. Je pus alors, presse de ses
questions, me debarrasser de son etreinte et ordonner aux sauvages qui
portaient mes effets de les deposer a la porte de la hutte et leur
enjoignis de se retirer. Je leur avais expressement defendu de raconter
la mort tragique d'Attenousse et je pouvais compter sur leur discretion.
Puis prenant Angeline et son enfant dans mes bras, comme je l'avais fait
les deux jours qui avaient precede mon depart, j'entrai dans la cabane
et les assis sur mes genoux.
Pendant, ce temps, la vieille mere dissequait chacun des traits de ma
figure comme si elle eut voulu y lire la terrible nouvelle que j'allais
leur annoncer et qu'elle semblait anticiper.
L'accablement dont mon ame etait en proie ne put leur echapper, elles
semblerent comprendre qu'un grand malheur etait arrive, et les
sanglots d'Angeline me tirerent de l'abime de douleurs ou j'etais
enfonce.--"Angeline, ma bonne, ma chere enfant, lui dis-je en
l'embrassant, ton mari etait trop parfait pour la terre, il ne pouvait
vivre au milieu des mechants qui rodent autour de nous. Dieu a voulu
qu'il me chargeat de te donner avec nous tous un rendez-vous dans le
ciel, car il l'a appele a lui. Une affreuse maladie l'a saisie a son
arrivee aux Trois-Rivieres, il un est mort entoure de tous les secours
de la religion benissant ton nom, celui de sa mere et faisant des voeux
pour le bonheur de son enfant. Il m'a charge de prendre soin de vous
tous et je ne faillirai pas a l'engagement que j'ai contracte sur son
lit de mort. Plutot m'arracher le coeur que de me separer de ton enfant
a laqu
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