us parcourumes les mers de ces parages a bord de
la corvette _La Brise_, commandee par le capitaine Le Blond, avec une
chance sans egale pour ainsi dire. Nous fimes des prises que nous
dirigeames vers Quebec et qui nous donnerent encore des sommes
considerables qui furent deposees en notre nom dans le Tresor Royal.
J'y etais pour ma part de pas moins de vingt-cinq mille piastres, dont
j'avais la reconnaissance. Cet argent devait etre retire par M. Odillon.
le missionnaire dont, j'ai parle plus haut.
Enfin, mus par le desir de revoir nos foyers, rassasies de gloire et de
nos parts prises, nous allions reprendre terre, lorsqu'un sloop qui nous
servait d'eclaireur vint nous informer qu'un gros batiment anglais se
dirigeait vers Boston. Son allure etait lourde et sa marche bien lente.
Il etait a dix-neuf milles de la cote et paraissait faire force de
voiles pour gagner sa destination. Unanimement nous decidames d'en faire
notre proie.
Nous levames l'ancre et nous nous mimes a sa poursuite. Nous ne fumes
pas longtemps sans l'atteindre. Apres vingt-quatre heures de course, nos
vedettes perchees dans les hunes, nous apprirent qu'elles apercevaient
les lumieres du batiment que nous convoitions. Il etait neuf heures du
soir. Nous mimes toute la toile disponible au vent et vers quatre heures
du matin, le batiment n'etait plus qu'a un demi-mille de nous. Nous
etions alors au mois d'aout et l'aurore est encore matinale dans les
latitudes septentrionales.
Au premier coup de canon que nous tirames, nous le vimes carguer
et mettre en panne. Des hourrahs de notre bord accueillirent cette
manoeuvre. Ce batiment etait a nous, nous le croyions deja, et
nous-memes avions serre nos voiles, car pendants ce temps, nous l'avions
approche a moins qu'a demi-portee de canon.
Mais le capitaine anglais etait un ruse vieux loup de mer. Pour retarder
la marche de son vaisseau et nous laisser approcher autant que possible,
il avait suspendu des sacs de sable qui l'empechaient d'avancer. Il
avait aussi masque l'ouverture des sabords et abaisse la mature des
ses _hautes oeuvres_. Cette tactique lui reussit parfaitement.
Malheureusement, nous avions affaire a une fregate de cinquante-six,
montee par trois cents hommes d'equipage, plus un regiment de soldats
qu'elle amenait a Boston. Nous ne nous en apercumes que lorsqu'il etait
trop tard. Notre chere corvette ne portait qu'a peine vingt petites
couleuvrines.
Nos succes anterieurs nous avaient
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