pris leur
parti du meurtre de Conradin de Hohenstaufen par Charles d'Anjou; cette
critique etait le plus bel eloge qu'on put faire d'une race qui ne
s'expliquera jamais comment certains peuples se depouillent en quelques
annees des souvenirs que les autres conservent a travers les siecles.
Les causes de cette desaffection publique sont-elles dans la legerete de
l'esprit francais? dans un abaissement des caracteres deprimes par
la plus stupefiante humiliation nationale? dans une demoralisation
consecutive a l'accroissement et a la vulgarisation du bien-etre
materiel, qui retrecit les idees au calibre des petits interets
immediats? dans le cosmopolitisme financier, qui subordonne les
principes aux effets et les sentiments aux profits palpables? Peut-etre
faudrait il les rechercher surtout dans deux ordres de phenomenes
dont l'un est nefaste et gros de menaces, tandis que l'autre, en
compensation, nous ouvre un avenir plein de promesses et soutient les
plus radieuses en meme temps que les plus solides esperances de la
patrie francaise: a notre passif, le decouragement ou ce pays est
enfonce chaque jour davantage par le pessimisme d'une presse acharnee a
ne fouiller que le mal, a n'etaler que les plaies, a ne publier que les
hideurs d'une nation dont la sante n'a jamais ete plus exuberante,
dont la fecondite au bien et la faculte du beau ne font doute que pour
elle-meme, et dont la principale cause de faiblesse est dans ce regime
enervant qui la reduirait bien vite a une hypocondrie plus desastreuse
que ne le seraient de veritables infirmites.
Pour ce qui est de notre actif, avec quelle encourageante satisfaction
on y inscrit le prodigieux mouvement d'une expansion coloniale, qui,
depuis vingt ans, a suscite tant d'admirables energies, secoue la
torpeur des energies industrielles et commerciales, ranime l'esprit
d'entreprise somnolent depuis un siecle, fait reapparaitre l'initiative
individuelle dont l'effacement nous menacait d'une decadence
irremediable, et ouvert a l'activite, par consequent a la prosperite
nationale, un vaste empire dont le spectacle doit suffire a nous rendre
le sentiment indispensable de notre force et de notre valeur!
Voila ce que nous a donne notre politique coloniale; il est vrai que
nous n'avons pas ete seuls a en beneficier et qu'elle a valu la paix a
l'Europe. On lui en a fait un crime.
Le grief etait-il fonde?
Il l'etait sans aucun doute, si l'on a lieu de croire que, sans l'oeuvre
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