considerables et ou sir Charles Beresford, au retour
de son importante mission en Extreme-Orient, s'intitule avec une
apparente modestie "le commis-voyageur" de la Grande-Bretagne.
Les nations europeennes semblent etre parvenues a ce point de
developpement ou l'individu, sentant se ralentir sa facilites de
produire, met a profit sa vieille experience pour tirer parti du travail
d'autrui; c'est pour cela que, sur toute la surface du globe, se debat
presentement la competition la plus apre qui ait jamais mis des gens
d'affaires aux prises: le partage des contrees de production entre les
vieux pays, dont l'activite doit se borner desormais a une exploitation
lucrative.
Le procede syndicataire est plus indique que tout autre pour une
operation de cette nature; il presente notamment l'avantage d'unir
les interets sans lier les parties, qui conservent toute leur liberte
d'action en dehors de l'objet special pour lequel est constitue le
syndicat. Il n'a pas les exigences etroites de l'association, ni ses
promiscuites; on a des interets communs, mais cela n'engage a rien pour
les relations personnelles, et les porteurs de parts ne sont aucunement
tenus de se saluer quand ils se rencontrent.
C'est un avantage a considerer lorsqu'il s'agit d'un reglement de
comptes comme celui que l'Europe peut avoir a effectuer d'un moment
a l'autre, et qui serait singulierement facilite par une association
temporaire, dans laquelle seraient totalises les credits individuels des
divers participants sans qu'il en resultat pour eux l'obligation de se
faire des politesses.
Laissant de cote pour quelques heures les ressentiments ineffacables et
reservant tous leurs droits sur le grave litige eleve entre elles il y a
trente ans, la France et l'Allemagne peuvent-elles decemment entrer dans
un syndicat de ce genre, en vue de sauvegarder des interets communs
qu'il leur est impossible de soutenir isolement et dont la realisation
se trouverait compromise par de plus amples delais?
Telle est la question. Pour la resoudre, le premier point a examiner,
c'est si leurs interets dans cette affaire sont d'un poids suffisant
pour contrebalancer le dommage sentimental que nous infligerait un tel
rapprochement? Est-il avere que l'expansion britannique constitue pour
le genre humain un peril, dont nous aurons a supporter le premier choc,
et si pressant qu'il nous faille imposer silence momentanement a notre
profonde rancune pour marcher a cote de l'ennemi
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