'Angleterre se trouve a l'occasion des affaires d'Amerique, nous
desirons plutot l'aider a se degager". C'etait douze ans apres le traite
de Paris, qui nous avait pris nos colonies; nous sommes au lendemain de
Fachoda, qui nous a definitivement arrache l'Egypte et le Haut-Nil. M.
de Vergennes ne persista pas dans sa doctrine. Notre diplomatie, qui a
imite sa prudence, saura-t-elle, au moment venu, prendre exemple sur sa
fermete?
Si la France est en cause dans la guerre du Transvaal? Quelle question!
Outre les interets considerables que nous avons sur place et meme dans
le voisinage, c'est indirectement toute notre entreprise coloniale,
c'est pour le moins notre situation en Afrique dont le sort se debat en
ce moment autour de Ladysmith, ou la lutte est engagee entre l'equilibre
africain et l'envahissement de l'Imperialisme, qui, s'il n'est arrete
net sur la route du Cap au Caire, rendra le continent intenable. On
peut dire de la question africaine, comme on l'a dit de la Revolution
francaise,--et plus justement, je crois,--que c'est un bloc. Il y a une
politique africaine pour l'Angleterre et il y en a une pour la France.
Toutes deux sont en presence.
Celle de l'Angleterre est encore au debut de sa course, qui menace tout
et tous; la notre est fixee, depuis peu, dans les limites a peu pres
inextensibles d'un Empire qui reunit nos fiefs mediterraneens (domaine
d'Algerie, protectorat de Tunisie, et preponderance economique dans une
partie du Maroc) avec nos possessions de l'Ocean (Senegal, Guinee, Cote
d'Ivoire, Dahomey, rattaches par le Soudan et les affluents du Tchad).
Le desert saharien, qui parait interposer entre ces deux groupements un
obstacle infranchissable est appele au contraire a les reunir tot
ou tard par les diverses branches du Transsaharien. C'est a cette
concentration de nos forces, a leur utilisation sur place, que doit
desormais se consacrer toute notre activite, et la splendide epopee des
conquistadors francais a pris fin [3].
[Note 3: Cela ne veut pas dire qu'il soit opportun de reduire
brusquement aux proportions les plus infimes nos forces et notre action
militaire dans ces regions,--comme pour faciliter a l'Angleterre la
concentration sur l'Afrique du Sud, de ses effectifs, brusquement rendus
disponibles, par une retraite aussi inattendue... du moins en France.]
A l'heure actuelle nous representons en Afrique l'equilibre et le
developpement pacifique, tandis que l'Angleterre y apporte l
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