ais eu la possibilite
d'exercer son droit de preemption dans l'eventualite tres probable ou
le Portugal se deciderait a vendre la baie pour faire face a des
difficultes financieres.
L'empire, pour se consolider, a souvent besoin d'acquerir quelque
territoire ou quelque port. Et cela afin de conserver nos possessions
comme un tout, de favoriser notre commerce et aussi de prevenir
certaines puissances toujours disposees a troubler l'equilibre
international. On ne pourrait trouver un meilleur exemple de cette
politique qui cherche a solidariser nos colonies et a fortifier l'empire
que dans les efforts continus de la Grande-Bretagne pour s'assurer la
possession de Delagoa qui doit couronner notre preponderance en Afrique.
On le voit, en s'abstenant aujourd'hui de prendre sur ce point des
mesures conservatrices, la France s'exposerait pour demain a un conflit
des plus graves avec son ennemie de tous les temps, avec celle contre
qui elle a du soutenir a travers tout le siecle dernier, selon
l'expression du general Niox, une guerre de cent ans coloniale, dans
laquelle nous retomberions fatalement si notre gouvernement ne savait se
contraindre, sans retard, a une fermete, qui est le premier devoir de la
prudence: "Il arrive toujours du mal aux elephants qui ont peur", assure
le judicieux pachyderme dont l'imperialiste Rudyard Kipling a fait le
heros d'un de ses plus beaux contes de la Jungle.
Nous avons donc quelques motifs de ne pas nous desinteresser de ce qui
se passe entre Johannesburg et le canal de Mozambique. Ceux du Portugal,
unique possesseur jusqu'a present de la colonie de ce nom, sont
tous aussi clairs et moins indirects. Nous verrons ensuite ceux de
l'Allemagne.
Apres une audacieuse tentative d'intrusion du cote de l'ilot d'Iniak
(Delagoa-Bay), dejouee en 1875 par la sentence arbitrale du marechal
Mac-Mahon et renouvelee en 1889 dans la vallee du Chire, les Portugais,
en presence d'un ultimatum apporte a Lisbonne par une escadre, durent
ceder a l'Angleterre une enorme etendue de territoire, convoitee par la
Chartered pour arrondir la Rhodesia. L'Europe resta chez elle.
Le Portugal etait encore une grande puissance africaine; cette
_diminutio capitis_,--ce Fachoda plus excusable,--la mit pour longtemps
a la merci de l'Angleterre qui depuis lors la persecuta d'un chantage,
dont la coupable indifference de l'Europe finirait par permettre le
succes. On sait avec quelle ruse grossiere mais efficace, la polit
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