offense aucun
organe essentiel; quant a Coconnas, il avait le poumon traverse,
et le souffle qui sortait par la blessure faisait vaciller la
flamme d'une bougie.
Maitre Ambroise Pare ne repondait pas de Coconnas.
Madame de Nevers etait desesperee; c'etait elle qui, confiante
dans la force, dans l'adresse et le courage du Piemontais, avait
empeche Marguerite de s'opposer au combat. Elle eut bien fait
porter Coconnas a l'hotel de Guise pour lui renouveler dans cette
seconde occasion les soins de la premiere; mais d'un moment a
l'autre son mari pouvait arriver de Rome, et trouver etrange
l'installation d'un intrus dans le domicile conjugal.
Pour cacher la cause des blessures, Marguerite avait fait porter
les deux jeunes gens chez son frere, ou l'un d'eux, d'ailleurs,
etait deja installe, en disant que c'etaient deux gentilshommes
qui s'etaient laisses choir de cheval pendant la promenade; mais
la verite fut divulguee par l'admiration du capitaine temoin du
combat, et l'on sut bientot a la cour que deux nouveaux raffines
venaient de naitre au grand jour de la renommee.
Soignes par le meme chirurgien qui partageait ses soins entre eux,
les deux blesses parcoururent les differentes phases de
convalescence qui ressortaient du plus ou du moins de gravite de
leurs blessures. La Mole, le moins grievement atteint des deux,
reprit le premier connaissance. Quant a Coconnas, une fievre
terrible s'etait emparee de lui, et son retour a la vie fut
signale par tous les signes du plus affreux delire.
Quoique enferme dans la meme chambre que Coconnas, La Mole, en
reprenant connaissance, n'avait pas vu son compagnon, ou n'avait
par aucun signe indique qu'il le vit. Coconnas tout au contraire,
en rouvrant les yeux, les fixa sur La Mole, et cela avec une
expression qui eut pu prouver que le sang que le Piemontais venait
de perdre n'avait en rien diminue les passions de ce temperament
de feu.
Coconnas pensa qu'il revait, et que dans son reve il retrouvait
l'ennemi que deux fois il croyait avoir tue; seulement le reve se
prolongeait outre mesure. Apres avoir vu La Mole couche comme lui,
panse comme lui par le chirurgien, il vit La Mole se soulever sur
ce lit, ou lui-meme etait cloue encore par la fievre, la faiblesse
et la douleur, puis en descendre, puis marcher au bras du
chirurgien, puis marcher avec une canne, puis enfin marcher tout
seul.
Coconnas, toujours en delire, regardait toutes ces differentes
periodes de la conva
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