if, madame, pourquoi?
-- Parce que vous pourriez lire les livres precieux qu'ont ecrits
les Hebreux sur les sacrifices. Je me suis fait traduire l'un
d'eux, et j'ai vu que ce n'etait ni dans le coeur ni dans le foie,
comme les Romains, que les Hebreux cherchaient les presages:
c'etait dans la disposition du cerveau et dans la figuration des
lettres qui y sont tracees par la main toute-puissante de la
destinee.
-- Oui, madame! je l'ai aussi entendu dire par un vieux rabbin de
mes amis.
-- Il y a, dit Catherine, des caracteres ainsi dessines qui
ouvrent toute une voie prophetique; seulement les savants
chaldeens recommandent...
-- Recommandent... quoi? demanda Rene, voyant que la reine
hesitait a continuer.
-- Recommandent que l'experience se fasse sur des cerveaux
humains, comme etant plus developpes et plus sympathiques a la
volonte du consultant.
-- Helas! madame, dit Rene, Votre Majeste sait bien que c'est
impossible!
-- Difficile du moins, dit Catherine; car si nous avions su cela a
la Saint-Barthelemy... hein, Rene! Quelle riche recolte! Le
premier condamne... j'y songerai. En attendant, demeurons dans le
cercle du possible... La chambre des sacrifices est-elle preparee?
-- Oui, madame.
-- Passons-y.
Rene alluma une bougie faite d'elements etranges et dont l'odeur,
tantot subtile et penetrante, tantot nauseabonde et fumeuse,
revelait l'introduction de plusieurs matieres: puis eclairant
Catherine, il passa le premier dans la cellule.
Catherine choisit elle-meme parmi tous les instruments de
sacrifice un couteau d'acier bleuissant, tandis que Rene allait
chercher une des deux poules qui roulaient dans un coin leur oeil
d'or inquiet.
-- Comment procederons-nous?
-- Nous interrogerons le foie de l'une et le cerveau de l'autre.
Si les deux experiences nous donnent les memes resultats, il
faudra bien croire, surtout si ces resultats se combinent avec
ceux precedemment obtenus.
-- Par ou commencerons-nous?
-- Par l'experience du foie.
-- C'est bien, dit Rene. Et il attacha la poule sur le petit autel
a deux anneaux places aux deux extremites, de maniere que l'animal
renverse sur le dos ne pouvait que se debattre sans bouger de
place. Catherine lui ouvrit la poitrine d'un seul coup de couteau.
La poule jeta trois cris, et expira apres s'etre assez longtemps
debattue.
-- Toujours trois cris, murmura Catherine, trois signes de mort.
Puis elle ouvrit le corps.
-- Et le foie pen
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