de Navarre
d'un espoir bien brillant, si brillant qu'il en a ete ebloui, de
l'espoir d'atteindre a la couronne de France? Hein? dites, suis-je
bien informe? Est-ce la ce que vous etes venu proposer au
Bearnais?
-- Monseigneur! s'ecria de Mouy, c'est si bien cela que je me
demande en ce moment meme si je ne dois pas dire a Votre Altesse
Royale qu'elle en a menti! provoquer dans cette chambre un combat
sans merci, et assurer ainsi par la mort de nous deux l'extinction
de ce terrible secret!
-- Doucement, mon brave de Mouy, doucement, dit le duc d'Alencon
sans changer de visage, sans faire le moindre mouvement a cette
terrible menace; le secret s'eteindra mieux entre nous si nous
vivons tous deux que si l'un de nous meurt. Ecoutez-moi et cessez
de tourmenter ainsi la poignee de votre epee. Pour la troisieme
fois, je vous dis que vous etes avec un ami; repondez donc comme a
un ami. Voyons, le roi de Navarre n'a-t-il pas refuse tout ce que
vous lui avez offert?
-- Oui, Monseigneur, et je l'avoue, puisque cet aveu ne peut
compromettre que moi.
-- N'avez-vous pas crie en sortant de sa chambre et en foulant aux
pieds votre chapeau, qu'il etait un prince lache et indigne de
demeurer votre chef?
-- C'est vrai, Monseigneur, j'ai dit cela.
-- Ah! c'est vrai! Vous l'avouez, enfin?
-- Oui.
-- Et c'est toujours votre avis?
-- Plus que jamais, Monseigneur!
-- Eh bien, moi, moi, monsieur de Mouy, moi, troisieme fils de
Henri II, moi, fils de France, suis-je assez bon gentilhomme pour
commander a vos soldats, voyons? et jugez-vous que je suis assez
loyal pour que vous puissiez compter sur ma parole?
-- Vous, Monseigneur! vous, le chef des huguenots?
-- Pourquoi pas? C'est l'epoque des conversions, vous le savez.
Henri s'est bien fait catholique, je puis bien me faire
protestant, moi.
-- Oui, sans doute, Monseigneur; mais j'attends que vous
m'expliquiez...
-- Rien de plus simple, et je vais vous dire en deux mots la
politique de tout le monde.
" Mon frere Charles tue les huguenots pour regner plus largement.
Mon frere d'Anjou les laisse tuer parce qu'il doit succeder a mon
frere Charles, et que, comme vous le savez, mon frere Charles est
souvent malade. Mais moi... et c'est tout different, moi qui ne
regnerai jamais, en France du moins, attendu que j'ai deux aines
devant moi; moi que la haine de ma mere et de mes freres, plus
encore que la loi de la nature, eloigne du trone; moi qui ne dois
pretend
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