limites. Je renvoie le propos, dans ses termes memes, aux
geometres.
Les soins de M. Daburon tirerent le jeune emule de Pascal de son
embarras, et l'introduisirent dans la haute analyse. En meme temps un
ami de M. Daburon, qui s'occupait avec succes de botanique, lui en
inspirait le gout, et le guidait pour les premieres connaissances. Le
monde naturel, visible, si vivant et si riche en ces belles contrees,
s'ouvrait a lui dans ses secrets, comme le monde de l'espace et
des nombres. Il lisait aussi beaucoup toutes sortes de livres,
particulierement l'Encyclopedie, d'un bout a l'autre. Rien n'echappait
a sa curiosite d'intelligence; et une fois qu'il avait concu, rien ne
sortait plus de sa memoire. Il savait donc et il sut toujours, entre
autres choses, tout ce que l'Encyclopedie contenait, y compris le
blason. Ainsi son jeune esprit preludait a cette universalite de
connaissances qu'il embrassa jusqu'a la fin. S'il debuta par savoir au
complet l'Encyclopedie du XVIIIe siecle, il resta encyclopedique toute
sa vie. Nous le verrons, en 1804, combiner une refonte generale
des connaissances humaines; et ses derniers travaux sont un plan
d'encyclopedie nouvelle.
Il apprit tout de lui-meme, avons-nous dit, et sa pensee y gagna en
vigueur et en originalite; il apprit tout a son heure et a sa fantaisie,
et il n'y prit aucune habitude de discipline.
Fit-il des vers des ce temps-la, ou n'est-ce qu'un peu plus tard? Quoi
qu'il en soit, les mathematiques, jusqu'en 93, l'occuperent surtout. A
dix-huit ans, il etudiait la _Mecanique analytique_ de Lagrange, dont
il avait refait presque tous les calculs; et il a repete souvent qu'il
savait alors autant de mathematiques qu'il en a jamais su.
La Revolution de 89, en eclatant, avait retenti jusqu'a l'ame du
studieux mais impetueux jeune homme, et il en avait accepte l'augure
avec transport. Il y avait, se plaisait-il a dire quelquefois, trois
evenements qui avaient eu un grand empire, un empire decisif sur sa vie:
l'un etait la lecture de l'Eloge de Descartes par Thomas, lecture
a laquelle il devait son premier sentiment d'enthousiasme pour les
sciences physiques et philosophiques. Le second evenement etait sa
premiere communion qui determina en lui le sentiment religieux et
catholique, parfois obscurci depuis, mais ineffacable. Enfin il comptait
pour le troisieme de ces evenements decisifs la prise de la Bastille,
qui avait developpe et exalte d'abord son sentiment liberal. Ce
s
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