ue les mains ont cueillies,
Que j'aime a respirer l'air que tu respiras!
Les voila ces jasmins dont je t'avais paree;
Ce bouquet de troene a touche les cheveux...
Ainsi, celui que nous avons vu distrait bien souvent comme La Fontaine
s'essayait alors, jeune et non sans poesie, a des rimes galantes et
tendres: _mistis carminibus non sine fistula_.--Mais le plus beau jour
de ces saisons amoureuses nous est assez designe par une inscription
plus grosse sur le cahier: LUNDI, 3 juillet (1797). Voici l'idylle
complete, telle qu'on la pourrait croire traduite d'_Hermann et
Dorothee_, ou extraite d'une page oubliee des _Confessions_:
"Elles vinrent enfin nous voir (_a Polemieux_) a trois heures trois
quarts. Nous fumes dans l'allee, ou je montai sur le grand cerisier,
d'ou je jetai des cerises a Julie, Elise et ma soeur; tout le monde
vint. Ensuite je cedai ma place a Francois, qui nous baissa des branches
ou nous cueillions nous-memes, ce qui amusa beaucoup Julie. On apporta
le gouter; elle s'assit sur une planche a terre avec ma soeur et Elise,
et je me mis sur l'herbe a cote d'elle. Je mangeai des cerises qui
avaient ete sur ses genoux. Nous fumes tous les quatre au grand jardin
ou elle accepta un lis de ma main. Nous allames ensuite voir le
ruisseau; je lui donnai la main pour sauter le petit mur, et les deux
mains pour le remonter. Je m'etais assis a cote d'elle au bord du
ruisseau, loin d'Elise et de ma soeur; nous les accompagnames le
soir jusqu'au moulin a vent, ou je m'assis encore a cote d'elle pour
observer, nous quatre, le coucher du soleil qui dorait ses habits d'une
lumiere charmante. Elle emporta un second lis que je lui donnai, en
passant pour s'en aller, dans le grand jardin."
Pourtant il fallait penser a l'avenir. Le jeune Ampere etait sans
fortune, et le mariage allait lui imposer des charges. On decida, qu'il
irait a Lyon; on agita meme un moment s'il n'entrerait pas dans le
commerce; mais la science l'emporta. Il donna des lecons particulieres
de mathematiques. Loge grande rue Merciere, chez MM. Perisse, libraires,
cousins de sa fiancee, son temps se partageait entre ses etudes et ses
courses a Saint-Germain, ou il s'echappait frequemment. Cependant,
par le fait de ses nouvelles occupations, le cours naturel des idees
mathematiques reprenait le dessus dans son esprit; il y joignait les
etudes physiques. La _Chimie_ de Lavoisier, publiee depuis quelques
annees, mais de doctrine si recente, saisis
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