sait vivement tous les jeunes
esprits savants; et pendant que Davy, comme son frere nous le raconte,
la lisait en Angleterre avec grande emulation et ardent desir d'y
ajouter, M. Ampere la lisait a Lyon dans un esprit semblable. De
grand matin, de quatre a six heures, meme avant les mois d'ete, il se
reunissait en conference avec quelques amis, a un cinquieme etage, place
des Cordeliers, chez son ami Lenoir. Des noms bien connus des Lyonnais,
Journel, Bonjour et Barret (depuis pretre et jesuite), tous caracteres
originaux et de bon aloi, en faisaient partie. J'allais y joindre, pour
avoir occasion de les nommer a cote de leur ami, MM. Bredin et Beuchot;
mais on m'assure qu'ils n'etaient pas de la petite reunion meme. On y
lisait a haute voix le traite de Lavoisier, et M. Ampere, qui ne le
connaissait pas jusqu'alors, ne cessait de se recrier a cette exposition
si lucide de decouvertes si imprevues. Au sortir de la seance matinale,
et comme edifie par la science, on s'en allait diligemment chacun a ses
travaux du jour.
Admirable jeunesse, age audacieux, saison feconde, ou tout s'exalte et
coexiste a la fois, qui aime et qui medite, qui scrute et decouvre, et
qui chante, qui suffit a tout; qui ne laisse rien d'inexplore de ce qui
la tente, et qui est tentee de tout ce qui est vrai ou beau! Jeunesse a
jamais regrettee, qui, a l'entree de la carriere, sous le ciel qui lui
verse les rayons, a demi penchee hors du char, livre des deux mains
toutes ses rapes et pousse de front tous ses coursiers!
Le mariage de M. Ampere et de Mademoiselle Julie Carron eut lieu,
religieusement et secretement encore, le 15 thermidor an VII (aout
1799), et civilement quelques semaines apres. M. Ballanche, par un
epithalame en prose, celebra, dans le mode antique, la felicite de son
ami et les chastes rayons de l'etoile nuptiale du soir se levant _sur
les montagnes de Polemieux_. Pour le nouvel epoux, les deux premieres
annees se passerent dans le meme bonheur, dans les memes etudes. Il
continuait ses lecons de mathematiques a Lyon, et y demeurait avec sa
femme, qui d'ailleurs etait souvent a Saint-Germain. Elle lui donna un
fils, celui qui honore aujourd'hui et confirme son nom. Mais bientot
la sante de la mere declina, et quand M. Ampere fut nomme, en decembre
1801, professeur de physique et de chimie a l'Ecole centrale de l'Ain,
il dut aller s'etablir seul a Bourg, laissant a Lyon sa femme souffrante
avec son enfant. Les correspondances sura
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